plongée dès l’abord en l’état de somnambulisme. Elle put me suivre dans la chambre, les yeux ouverts. Le jour suivant, endormie une seconde fois en cinq minutes, je lui donnai des hallucinations de la vue, de l’ouïe et de l’odorat.
Enfin deux autres jours furent consacrés à renforcer chez elle la faculté imaginative, à lui faire exécuter, à ce que je croyais alors être l’état de veille[1], des ordres donnés pendant le sommeil ; enfin à provoquer en elle des phénomènes d’oubli, de paralysie, de contracture, de catalepsie, d’insensibilité.
Bien que j’aie l’air de répéter des choses connues, je dois entrer en quelques détails à l’occasion de ces derniers phénomènes. On n’a pas oublié que je désirais uniquement explorer la mémoire des hypnotisés.
C’est pourquoi j’avais cru devoir m’abstenir avec J… d’expériences de simple curiosité, et mes exercices préliminaires n’eurent d’autre but que de l’assouplir, et, si je puis ainsi dire, de l’amener au point requis pour mes expériences ultérieures, Je les ai donc gradués systématiquement à ma façon, et j’ai porté mon attention sur le procédé qui me servait à obtenir les effets désirés. Ce procédé a été uniformément le même : la suggestion, sous une forme plus ou moins patente ou déguisée.
S’agissait-il, par exemple, de produire de la paralysie, je lui tiraillais le bras et passais ma main d’un bout à l’autre, en lui disant qu’elle ne pourrait plus le remuer. S’il lui arrivait néanmoins de réussir à le mouvoir encore un peu, je réitérais et la pression et la suggestion avec une assurance plus marquée. L’effet était finalement obtenu.
De même pour les contractures : « Ne vous laissez pas abaisser le bras, ouvrir le poing, etc. »
De même pour les poses cataleptiques : « Gardez votre bras dans cette position, ne bougez pas ! »
Au bout de deux ou trois exercices qui ne prenaient chacun que quelques minutes, les ordres n’eurent plus besoin d’être donnés avec la voix. J… reconnut de plus en plus rapidement, d’après la qualité de la manœuvre, ce que je voulais, si c’était une paralysie, une contracture, ou une simple figure. Et aujourd’hui son intelligence — il me semble que c’est le mot propre — est tellement affinée qu’un spectateur — la preuve en a été mainte fois faite — ne peut
- ↑ J’ai, dès la première fois, conçu des doutes à ce sujet. Ces doutes sont actuellement chez moi changés en certitude. Ce soi-disant état de veille est bel et bien du sommeil. À bientôt les preuves.
