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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


Paul Janet.Victor cousin et son œuvre, 1 vol.  in-8o. Paris, Calmann-Lévy, 1885.

Il a paru à M. Paul Janet que les nouvelles générations de philosophes témoignaient une sévérité excessive à l’égard de Victor Cousin, et il a estimé d’autre part que Cousin avait tenu une trop grand e place dans la philosophie de son temps, exercé une influence trop con sidérable, pour ne pas mériter qu’on lui fit enfin justice, et qu’on le mît à son rang. Ce n’est pas toutefois un simple plaidoyer qu’il s’est proposé d’écrire, encore moins un panégyrique sans réserves : c’est un livre d’histoire qu’il a entendu faire, et qu’il a fait, recourant sans cesse aux documents les plus précis et les plus sûrs, s’entourant des renseignements les plus authentiques, disant le mal comme le bien, tel qu’il le voyait, poursuivant en un mot son enquête avec une impartialité, une loyauté qu’on ne trouvera pas, croyons-nous, une seule fois en défaut. Rien n’empêchait après cela qu’il laissât éclater en plus d’un endroit l’admiration, l’affection profonde, la reconnaissance dont son cœur est rempli. À vrai dire, malgré toutes ces qualités, il ne nous paraît pas probable que l’œuvre nouvelle de M. Janet réconcilie tout le monde avec la mémoire de Cousin, et efface toutes les dissidences. Cela ne s’est jamais vu. Mais ceux même qui n’approuveront pas son dessein reconnaîtront que son livre est un chef-d’œuvre de discussion clairement et savamment conduite. Ceux qui ne lui accorderont aucune de ses conclusions, ne pourront s’empêcher de rendre hommage au noble sentiment qui l’a inspiré, comme à l’impartialité dont il a fait preuve. Pour notre part, nous n’hésitons pas à déclarer, sauf quelques réserves sans grande importance, que M. Janet a atteint le but qu’il se proposait, et qu’il a fait, comme il le voulait, une œuvre de réparation et de justice. Ce n’est pas toutefois, hâtons-nous de le dire, que les jeunes philosophes n’aient eu d’assez bonnes raisons de juger Cousin comme ils l’ont fait dans les derniers temps de sa vie, et même qu’ils n’aient eu partiellement raison. La plupart des griefs qu’ils avaient contre lui étaient fondés, et M. Janet, avec sa grande bonne foi, finit par le reconnaître. On lui reprochait son attitude à l’égard du clergé, devant lequel il paraissait trembler, et à qui il faisait trop de concessions. « Ce n’est un