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très variés, ont fait naître dans l’Inde une foule de races secondaires, plus nombreuses et plus distinctes que celles qui peuplent, par exemple, le continent européen tout entier.

Le terme d’Hindou, n’a donc, au point de vue ethnologique, absolument aucun sens. Dans l’Inde même, il désigne simplement tout individu qui n’est ni musulman, ni chrétien, ni juif, ni parsi, et qui peut se rattacher à l’une des castes créées par la religion brahmanique et reconnues de fait, sinon en principe, par les Bouddhistes eux-mêmes. Ces castes innombrables aujourd’hui n’étaient qu’au nombre de quatre à l’origine, celle des Brahmanes ou prêtres, des Kchatryas ou guerriers, des Vaïsyas ou marchands, et des Soudras ou agriculteurs. Sans correspondre absolument aux divisions de race, elles fournissent des indications utiles sur leur origine. Le Brahmane est plutôt aryen ; le Kchatrya, rajpout ; le Vaïsya, touranien ; et le Soudra, descendant de Touraniens mêlés à des aborigènes.

Les plus anciens habitants de l’Inde étaient noirs. Il semble que, dès les temps les plus reculés, ils se divisaient en deux groupes : les négritos, petits de taille, à la chevelure laineuse et aux traits écrasés, habitant l’est et le centre, et les nègres, au type australien, plus grands, plus intelligents, aux cheveux plus lisses, habitant le sud et l’ouest. Les premiers se retrouvent encore dans quelques régions sauvages et montagneuses du Gondwana, et les seconds dans les vallées des Nilghirris. Ces races incultes et primitives, qui ne s’élevèrent jamais au développement le plus élémentaire, occupèrent les forêts et les rivages de l’Inde pendant la période préhistorique ; refoulées chaque jour par les progrès de la civilisation, elles tendent de plus en plus à disparaître.

L’Inde est un pays fermé, d’un accès fort difficile. L’Himalaya et la mer l’isolent presque entièrement du monde. Ses côtes, sur le golfe du Bengale, sont rendues inabordables par un formidable ressac ; du côté de la mer d’Oman ou d’Arabie, les vents de la mousson ont pu quelquefois chasser vers ses bords des barques d’aventuriers africains ; mais ces étrangers se sont trouvés arrêtés dès leurs premiers pas par le mur des Ghats occidentales, à l’abri duquel les populations, même très imparfaitement armées, des plateaux, pouvaient les braver sans danger.

Toute idée d’une invasion maritime de l’Inde à aucune époque devant être d’abord écartée, on voit que les conquérants étrangers n’ont pu pénétrer dans la péninsule que par l’Himalaya. Ce gigantesque rempart la protège sur une immense longueur, mais il s’abaisse à ses deux extrémités ; deux vallées, celle du Brahma-