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G. LE BON.applications dr la psychologie

poutre à l’est, celle de la rivière de Kaboul à l’ouest, s’élargissent à sa base, et tournent son mur colossal ; c’est par elles que pendant des siècles des flots ´de conquérants asiatiques se sont rués dans les plaines fertiles de l’Hindoustan. Les plus nombreux, les plus terribles, sont descendus de l’Occident ; car des deux voies, la plus facile à suivre, c’est celle que forment les bords de la rivière de Kaboul ; le cours à peine connu encore du Brahmapoutre traverse des régions où la nature farouche arrête la marche de l’homme par sa végétation désordonnée et par son énervant climat.

Malgré cette différence entre les deux vallées, les Anglais leur ont donné une double dénomination, qui, sans être absolument exacte, marque d’une façon frappante leur caractère si important au point de vue de la géographie de l’Inde et de la façon dont ce grand pays s’est peuplé ; ils les ont appelées : la porte aryenne et la porte touranienne.

La porte touranienne, ou vallée du Brahmapoutre, n’a point donné passage aux Touraniens dans le sens restreint, mais dans le sens général de ce mot. La dénomination de Touraniens, qui désigne plus spécialement les peuples du Turkestan ou Touran et ceux qui leur ressemblent, est parfois en effet étendue jusqu’à la race jaune tout entière. Ce sont de vrais jaunes, à la face glabre, aux yeux obliques, qui franchirent la porte touranienne de l’Inde à une époque préhistorique, et apportèrent dans la péninsule le premier élément étranger. Les Touraniens proprement dits, dont les cheveux sont lisses, la barbe assez fournie et les yeux horizontaux, n’arrivèrent que plus tard, et c’est par la porte aryenne que s’engouffra dans les plaines le torrent de leurs invasions.

Mais avant de parler de ces derniers, voyons ce que devint dans l’Inde l’élément jaune pur, et quelles traces il y a laissées.

S’éloignant de la vallée du Brahmapoutre et se dirigeant vers le sud, les premiers envahisseurs de l’Inde se trouvèrent arrêtés par l’obstacle que leur opposait le massif central. Cette région montagneuse, point culminant de la péninsule, est celle qui porte aujourd’hui le nom de Gondwana. Elle servit de refuge aux populations noires trop faibles pour se défendre ; l’abri qu’elles y trouvèrent empruntait sa sûreté moins encore à la nature sauvage et hérissée du sol qu’aux dangers du climat, mortel aux étrangers.

L’invasion jaune, ainsi arrêtée, se partagea en deux branches, dont l’une remonta la vallée du Gange, tandis que l’autre continua sa marche vers le sud en suivant les côtes du golfe du Bengale.

Des premiers mélanges entre les conquérants asiatiques et les nègres de l’Inde, résultèrent les populations dites protodravidiennes,