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ANALYSES.p. kipper. Vie intellectuelle, etc.

ne sont pas postérieurs au besoin de se nourrir et ne sont pas moins forts. Au reste l’auteur reconnaît lui-même dans « le couple androgyne », dans la famille, le type primitif de la société. Or il est évident que le besoin économique n’est pas le ciment de la société domestique si rudimentaire soit-elle. Combien il est peu vraisemblable d’ailleurs que tous ces faits se soient développés suivant une série linéaire ! Tout au contraire l’histoire nous apprend qu’ils se pénètrent mutuellement, sont sans cesse enchevêtrés les uns dans les autres, à tel point qu’il est malaisé de les distinguer, à plus forte raison de les classer. Les formes rectilignes ne se rencontrent guère dans la nature.

Mais il ne faut pas oublier que le livre de M. De Greef n’est qu’une Introduction à la Sociologie. Il aura sans doute dans la suite de son ouvrage l’occasion d’éclaircir quelques-uns des points restés obscurs. Toujours est-il que cette première partie laisse au lecteur le désir de voir bientôt paraître le reste.

Émile Durkheim.

Paul Kipper, Geistesleben und Descendenzlehre (Vie intellectuelle et théorie de la descendance). Naumbourg, 1885.

Qu’est-ce que l’esprit ? — Qu’est-ce que le sujet transcendantal des pensées, cet x autour duquel nous tournons dans un cercle perpétuel ? (Kant). Le problème a reçu des solutions différentes, aux différentes époques de l’histoire. Passons sur les philosophes de l’antiquité, les Anaxagore, les Platon et les Aristote, et écoutons une secte moderne, celle des matérialistes. Satisfont-ils notre esprit ? donnent-ils une solution admissible pour tout le monde ? C’est ce que l’auteur examine dans la première partie du travail que nous allons résumer aussi fidèlement que possible.

Les matérialistes, loin d’admettre l’esprit comme une chose, disent qu’il n’est qu’une apparence concomitante du principe opposé, de la matière ; de plus ils s’appuient sur un nombre considérable de faits pour soutenir la dépendance causale de l’âme à l’égard du corps. Non seulement l’opium fait dormir, le vin enivre, un ramollissement du cerveau entraîne la folie, etc., etc., mais, observations plus délicates, le caractère et les mœurs d’une nation sont le produit du climat, de la nourriture et du sol. En dernière analyse, la vie de l’âme dépend de l’état du cerveau, déterminé par des influences extérieures. Telle est la proposition fondamentale de tout matérialisme.

Leibnitz et Kant remplacent les atomes corporels par des dynamides ; ils résolvent donc entièrement la matière en force, de sorte que, conséquemment, ce n’est plus la matière, mais la force qui devient substance du monde ; l’idéaliste a donc un droit égal à réclamer cette substance force comme esprit, puisque les hylozoïstes (Fechner, Zöllner, Hartmann) accordent déjà aux atomes, comme propriété fondamentale, la sensibilité. D’un côté, le matérialisme, non plus qu’une autre doctrine, ne