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l’impossibilité ou l’extrême difficulté de l’effort. Rien ne converge ni spontanément, ni par artifice ; tout reste flottant, indécis et dispersé. On en trouve de nombreux exemples chez les hystériques, les gens atteints de faiblesse irritable, les convalescents, les sujets apathiques et insensibles, dans l’ivresse, dans l’état de fatigue extrême du corps ou de l’esprit, etc. Cette impuissance coïncide, en somme, avec toutes les formes d’épuisement. Nous désignerons ce groupe, par opposition à l’autre, sous le nom d’atrophie de l’attention.

Remarquons en passant que le premier groupe d’états morbides relève "plutôt de l’attention spontanée et le second de l’attention volontaire. L’un dénote une force exagérée, l’autre une faiblesse exagérée du pouvoir de concentration. L’un est une évolution et va vers le plus, l’autre est une dissolution et va vers le moins. Dès à présent, la pathologie vérifie ce qui a été dit précédemment. L’attention volontaire, comme toutes les œuvres artificielles, est précaire, vacillante. La maladie ne la transforme pas, mais la fait tomber en ruine. L’attention spontanée, comme toutes les forces naturelles, peut s’amplifier jusqu’à l’extravagance, mais elle ne peut que se transformer ; au fond, elle ne change pas de nature : c’est comme un vent léger d’abord qui devient tempête.

3o Le troisième groupe comprend non des formes morbides de l’attention, mais une infirmité congénitate. Tels sont les cas où l’attention spontanée et à plus forte raison l’attention volontaire ne se constituent pas ou bien n’apparaissent que par éclairs. Cela se rencontre à divers degrés chez les idiots, les imbéciles, les faibles d’esprit, les déments.

Après cette classification rapide, passons aux détails.

I

Il est bon d’abord de remarquer qu’il y a une transition presque insensible de l’état normal aux formes les plus extravagantes de l’idée fixe. Il est arrivé à tout le monde d’être poursuivi par un air musical ou une phrase insignifiante qui revient obstinément, sans raison valable. C’est la forme la plus légère de l’idée fixe. L’état de préoccupation nous conduit à un degré plus haut le souci d’une personne malade, d’un examen à préparer, d’un grand voyage à entreprendre, et mille autres faits de ce genre, sans constituer pour la conscience un état d’obsession véritable, agissent par répétition. Malgré son intermittence, l’idée reste vivace, jaillissant brusquement du fond de l’inconscient ; elle a plus de stabilité qu’aucune