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qu’ils partent d’un même point de l’espace). Si l’on fait passer constamment par ces trois points les trois côtés d’un angle trièdre déterminé, leur mouvement sera évidemment rectiligne par rapport à ce système d’axes et le principe doit s’entendre en ce sens que, par rapport à un tel système (Inertialsystem), le mouvement de tout autre point matériel libre sera également rectiligne.

Il y a d’ailleurs une infinité de systèmes d’inertie idéaux auxquels on peut ainsi rapporter les corps de la nature ; mais tous ces systèmes sont liés entre eux de telle sorte que chacun d’eux, par rapport à un quelconque des autres, n’a qu’un mouvement rectiligne de translation parallèlement à lui-même.

Cela revient à dire une chose connue depuis bien longtemps de tous les auteurs, qu’il est absolument impossible, en supposant l’espace absolu, de déterminer si un système donné (par exemple l’ensemble du monde visible) est ou non animé d’un mouvement de translation. M. Lange a le mérite d’avoir précisé l’élément conventionnel qui entre dans la détermination effective des mouvements rectilignes, mais son mode d’exposition n’a pas encore toute la clarté désirable pour l’enseignement des principes d’une science.

Le volume qu’il vient de publier n’est d’ailleurs nullement didactique ; comme l’indique le sous-titre (Contribution à la critique historique des principes de la Mécanique), il a plutôt pour objet l’étude de l’histoire du concept de mouvement. Aristote, les Scolastiques, Copernic, Galilée, Descartes, Newton, Euler, Kant passent successivement devant nos yeux et leurs idées sont soumises à une exacte et pénétrante analyse, dont les conclusions sont résumées dans une critique de la science contemporaine. L’ouvrage de M. Lange ne vaut donc pas seulement par l’idée directrice, mais peut-être surtout par le détail, que cependant nous ne pouvons aborder ici.

Dans une précédente revue (1884, I, p. 431), j’ai déjà dit quelques mots de la Théorie générale des fonctions de M. Paul du Bois-Reymond. Cet ouvrage vient d’être traduit en français par M. Milhaud, professeur de mathématiques spéciales, avec l’aide de M. Girot, son collègue au lycée du Havre. L’auteur a profité de l’occasion pour apporter à son œuvre quelques changements et quelques additions qui ne touchent point d’ailleurs au fond.

D’autre part, M. Milhaud, dans une préface où il a fait preuve d’un véritable esprit philosophique, mais où il s’adresse surtout aux mathématiciens, a expliqué dans quel but il avait fait cette traduction ; il a insisté avec une grande vigueur sur l’importance de la discussion des notions mathématiques fondamentales, comme celles de grandeur, limite, variable, fonction, notions qui sont d’ordinaire admises comme suffisamment représentées par des définitions plus ou moins vagues et se prêtant à des déductions dont la rigueur laisse plus ou moins à désirer.

Je suis porté néanmoins à penser que l’ouvrage de M. Paul du Bois-