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ANALYSES.j. e. maude. The foundation of Ethics.

acte est l’exercice que je fais de ma volonté en m’efforçant de faire prévaloir une idée sur une autre idée. Mais tout exercice de ce genre de la volonté est, comme nous l’avons vu, la vertu. »

C’est ainsi que l’auteur arrive à une conclusion importante : « restreignons pour notre but actuel la signification du mot action à l’action humaine (les effets qui résultent de la prédominance d’une idée dans l’esprit étant plus proprement appelés mouvement (motion), la vertu et l’action deviennent synonymes, la vertu est l’action. » Tant qu’un homme agit, il est vertueux, non pas tant que ses idées, ou ses impulsions, ou son corps agit, mais tant qu’il agit lui-même. »

Mais cette conception implique des conséquences singulières. M. Maude ayant établi ou pensé établir que la vertu et le vice, le mérite et le démérite n’avaient rien à faire avec les conséquences bonnes ou mauvaises de nos actes, il admet que toute action volontaire et faite avec effort est vertueuse, digne d’éloges. On ne pourrait donc pas sans doute lui objecter logiquement que l’on peut vouloir le mal avec effort et l’accomplir. M. Maude prévoit l’objection cependant et il y fait une réponse qui n’est pas absolument impliquée par sa théorie générale : il nie qu’on puisse avoir réellement, en agissant, une mauvaise intention. Tous les buts, toutes les intentions, tous les motifs sont bons. Il faut dire ici que l’auteur est hédoniste, pour lui le bien c’est le plaisir, le bonheur, la douleur est le mal. Or, dit-il, l’homme qui assassine pour voler de l’argent ne veut pas le mal, il veut l’argent, l’argent peut lui procurer du plaisir et c’est un bien, c’est donc un bien qu’il veut, et s’il pouvait l’avoir sans assassiner, il n’assassinerait pas. Si on lui objecte que certains dépravés paraissent aimer le mal pour lui-même, M. Maude répond que d’abord les cas n’en sont pas nombreux, que, ensuite, c’est un fait qui rentre entièrement dans sa manière de voir, car si une personne fait le mal pour le plaisir de le faire, c’est ce bien, le plaisir du mal, qu’elle recherche, car ce plaisir, considéré en lui-même, est un bien. Tous les actes sont donc dirigés par de bonnes intentions. Cependant M. Maude reconnaît que ces intentions ne sont pas également bonnes, elles diffèrent entre elles par leur degré de bonté, et elles diffèrent de deux manières, en elles-mêmes d’abord et ensuite par les moyens employés pour les réaliser. D’ailleurs le bien n’a rien à faire avec l’éthique, la science de la vertu et du vice, « la détermination de cette question, qu’est-ce que le summum bonum, la fin particulière vers laquelle doivent tendre les actions vertueuses, passe pour être d’une importance fondamentale pour l’éthique ; mais si nous limitons la science de l’éthique à sa sphère propre, la question devra être considérée comme ne le concernant en rien (the question is not te be regarded as an ethical question at all) », la veriu est indépendante du but de l’acte, elle consiste simplement dans l’effort, sans se rapporter en rien à l’objet pour lequel l’effort est exercé.

Quant au vice, il ne peut être logiquement que le contraire de la vertu. « Puisque la vertu est action, le vice doit être inaction ou inertie. »