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la distance à laquelle se trouve l’objet, distance qui n’est évidemment pas donnée par la quantité de l’excitant, puisqu’un objet très lumineux peut être très éloigné, alors qu’un objet très obscur peut être tout proche.

En outre, quand on fait mouvoir devant les yeux d’un très jeune enfant, ou d’un animal peu intelligent, ou d’un animal plus intelligent, privé de ses hémisphères cérébraux, une lumière un peu vive, il suit des yeux l’objet lumineux qui se déplace, et même, dans certains cas, il tourne la tête, en même temps que l’objet se déplace.

J’ai eu l’occasion de signaler le réflexe d’accommodation du pavillon de l’oreille avec le mouvement d’un objet dont le déplacement est perçu par l’œil. Si à un lapin on lèse assez profondément les hémisphères cérébraux, de manière à plonger l’animal dans une sorte de coma, on observe que le pavillon de l’oreille a gardé son extrême mobilité, que cette mobilité s’est même accrue, et que l’animal suit avec son oreille non seulement la direction des sons qu’on produit à côté de lui, mais encore la direction des mouvements silencieux. Ainsi, que l’on déplace devant ses yeux un objet brillant, le pavillon de l’oreille fait le même tour que l’objet brillant qu’on déplace. C’est même un assez curieux spectacle que de voir un lapin presque absolument immobile, dont l’oreille décrit exactement le même demi-cercle qu’on fait devant ses yeux avec un objet brillant.

Ainsi, pour les réflexes de la vue, nous avons cette triple accommodation :

1o Mouvements du muscle ciliaire ;

2o Mouvements de direction des globes oculaires ;

3o Mouvements de la tête et du pavillon de l’oreille.

Mais il est bon qu’ici encore on remarque combien cette classification est artificielle. En effet, la contraction de l’iris est un réflexe simple, et pourtant c’est une sorte d’adaptation, tout à fait analogue à celle du muscle ciliaire, si analogue, qu’anatomiquement et physiologiquement ces deux appareils peuvent presque se confondre. D’autre part, les mouvements de la tête et des globes oculaires se confondent presque avec les mouvements émotionnels généraux de l’animal et rentrent tout à fait dans les réflexes psychiques d’émotion.

Donc, une fois encore, pas de démarcation entre les phénomènes : ils se touchent tous de très près, et ils sont unis l’un à l’autre par une chaîne qui n’a pas de fin, et dont chaque anneau ressemble aux deux anneaux qui le touchent.

Pour le sens de l’ouïe, il y a aussi une adaptation très précise de l’organe à la qualité de l’excitant.