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tion — qu’il y a contradiction entre ces deux expressions : psychique et mécanique ; un fait psychique ne pouvant être un fait mécanique. Je ne vois, pour ma part, aucune raison pour refuser à un fait d’adaptation, comme le mouvement du muscle ciliaire, le caractère psychique ; et, d’un autre côté, il semble bien être mécanique, c’est-à-dire fonctionnant, d’après la qualité de l’excitant, avec une régularité et une fatalité qui excluent toute fantaisie et toute indépendance individuelle.

Ce qui caractérise le fait psychique, c’est la connaissance de l’excitation, et par suite un certain jugement. Dans les exemples que nous venons de donner, la connaissance est des plus vagues ; mais, pour vague qu’elle soit, elle n’en existe pas moins. Il se fait un certain jugement, par lequel on apprécie la distance d’un objet, la tonalité d’un son, la direction d’un corps qui se déplace. Mais je ne vois pas pourquoi ce fait d’un jugement exclut le fait d’un mécanisme. C’est un mécanisme intelligent ; car il a un double caractère, adaptation et par conséquent appréciation, ce qui lui donne le caractère psychique, fatalité et nécessité, ce qui lui donne le caractère mécanique.

On pourrait en effet supposer un appareil, comme une roue de moulin par exemple, se réglant automatiquement, et disposée de telle sorte qu’à une température de 10° elle fasse 3 tours de roue par seconde, à une température de 20° 6 tours de roue, et à une température de 30° 9 tours de roue par seconde, etc. : cet appareil paraitrait presque intelligent, puisqu’il semblerait se conformer, avec une grande précision, aux conditions extérieures variables. Mais ce n’en sera pas moins un pur mécanisme, auquel on refusera toute fonction psychique, quelque bien réglé qu’il paraisse.

Toutefois pour les êtres vivants nous ne pouvons supposer un mécanisme aussi simple ; nous savons par expérience que certains phénomènes d’adaptation sont accompagnés de conscience, et alors nous disons qu’ils sont psychiques ; mais cette conscience n’indique pas qu’ils ne sont pas mécaniques. Il n’y a pas, ce me semble, de contradiction entre un fait psychique et un fait mécanique, et je concevrais à la rigueur que cette même horloge bien réglée, automatique, s’adaptant à la température ambiante, eût une conscience, sans que pour cela elle fût moins bien réglée. Elle serait un rouage tout aussi mécanique et fatal que précédemment, mais avec la conscience en plus, et alors on aurait le droit de lui donner le caractère psychique.

Ainsi les réflexes d’adaptation impliquent une certaine connais-