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beaucoup d’enfants, peut-être par imitation, ne se contentent pas d’un bonhomme aussi réduit. Même à l’âge de quatre ans, je les vois tracer une face de profil, ovale ou carrée, avec un groin en forme de nez, et, dessous, rattaché à la tête par une ligne droite, ou simplement rapproché d’elle, un sac ni carré ni long, quelquefois conique, d’autres fois piriforme, qui fait l’office de buste. Certains enfants de cet âge ne font que des dessins de profil ou de face ; d’autres réunissent les deux.

Les progrès, plus ou moins spontanés, ne suivent jamais une ligne d’évolution bien régulière. Ils se font en détail, comme par hasard, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Ils n’en obéissent pas moins à des conditions générales, qu’expliquent tout à la fois l’ignorance technique de l’enfant, sa courte observation, sa mémoire et son attention capricieuses, et surtout ce qu’on peut appeler également la raison ou les erreurs de sa logique.

C’est naturellement la tête, dont la beauté et l’expression ont tout de suite intéressé l’enfant, qui s’enrichit la première de détails importants. Le point noir qui représentait d’abord l’œil, dans les figures de profil, s’entoure d’un petit cercle ; ainsi la prunelle, le blanc de l’œil et les paupières sont distingués. Ce perfectionnement du dessin de l’œil affecte plus rarement les figures de face, soit que les deux points rapprochés produisent une physionomie suffisante, soit que ce travail plus long rebute le jeune dessinateur. Cependant, sur plusieurs figures de face, je vois les deux yeux représentés par un point avec deux traits droits, ou à peine incurvés. Mais l’œil de la figure unilatérale est toujours plus soigné. Il affecte quelquefois la forme d’un cône renversé, dont la base s’appuie sur l’axe du nez ; plus rarement (enfants de sept à huit ans), le premier cercle entourant le point noir s’enveloppe lui-même d’un cercle plus grand. Le sourcil doit être compris dans cette figuration, car je ne le trouve jamais exprimé par un trait spécial.

Le nez est toujours très mal fait, même par des enfants de huit à dix ans. Ils le font très souvent exagéré dans le sens aquilin ou camus, et très grotesque, sans nulle intention pareille. C’est quelquefois le nez de famille, sans doute parce que la forme en est plus habituellement sous les yeux du dessinateur novice, qui, lui aussi, travaille d’imagination, de chic, comme disent les artistes, c’est-à-dire d’après ses impressions dominantes.

Une ligne courbe ou brisée un peu au-dessous du nez, dans les têtes en profil, accuse souvent la bouche, dès que l’enfant commence à s’en préoccuper. Cette ligne est si peu apparente, quand la bouche de l’original est fermée, que l’enfant songe assez tard à la reproduire.