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air de parenté, entre les têtes dessinées, à quatre ou cinq ans d’intervalle, par les mêmes enfants, quand ils n’ont pas appris le dessin ou copié des images variées. Cela tient sans doute à la routine de la main plus qu’au défaut d’observation. Les enfants que j’ai fait dessiner devant moi, après les avoir priés de ne pas recommencer toujours la même tête, n’ont pas eu de peine à lui trouver des variantes.

L’insertion des bras est un des faits les plus curieux de l’art enfantin. Bien qu’on les voie souvent absents dans les premiers dessins, l’enfant même de quatre ans s’en préoccupe quelquefois comme d’un élément très important de sa description. Il les représente d’abord allongés des deux côtés de la personne humaine, soit par deux lignes droites, soit par deux lignes brisées. La largeur des lignes dépend du crayon employé ; s’il est gros, elles seront plus épaisses, mais jamais doubles pour les deux bras. Ceci est un progrès qui ne vient que beaucoup plus tard, à l’âge de sept, huit ou neuf ans. Alors chaque bras sera représenté par un informe boyau allongé. Mais déjà, au début, les extrémités mobiles de la main, qui ont si vivement intéressé l’enfant même au berceau, figurent aussi dans ses notations graphiques. Les appendices digitaux sont à peu près identiques pour les deux mains : ce sont des petites lignes, variant de trois à cinq, six ou sept, qui irradient au point terminal du bras. J’ai rarement vu des enfants de huit ou dix ans dessinant les doigts en nombre voulu, et assez régulièrement. Le détail est important, on l’indique ; mais il est d’une exécution trop délicate, on ne s’y arrête pas.

Le point d’insertion des bras est très variable, selon l’âge et le degré d’observation ou d’habileté technique. Quand la tête et le torse sont réunis, il est naturel que les deux membres supérieurs partent du milieu ou du bas de ce carré ou de cet ovale mal fait. Quand le buste est séparé de la tête, les bras partent du carré ou du sac qui le représente, du cou, ou bien du point d’insertion ou même d’un point quelconque des jambes.

Tout en les faisant diverger de gauche et de droite, beaucoup d’enfants, même à neuf ou dix ans, font partir les deux bras du même côté du torse. Cela provient-il d’une inhabileté artistique, et d’une ignorance relative des effets d’optique ? De l’une et de l’autre. Ils savent bien que les deux bras ne partent pas du même point ; mais, ne pouvant dessiner en profil qu’un seul côté, ils placent le bras sur un point du torse qui représente à peu près pour eux la partie d’où il émerge naturellement. Leur procédé tient aussi à une sorte d’erreur, à la fois technique et logique, dont il sera question plus loin. En tout cas les enfants intelligents, même à l’âge