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ANALYSES.ch. richet. Essai de psychologie générale.

désirs, on comprend moins nettement de quelle façon peuvent se dégager du réflexe où ils n’étaient pas contenus les phénomènes de représentation et ce qui est leur condition en même temps que des désirs, la conscience. M. Richet cherchant à déduire des propriétés de la matière vivante les caractères des phénomènes psychiques et leurs lois, il était naturel qu’il fît une large place à l’étude de l’irritabilité : le chapitre qu’il a écrit sur cette question est d’un grand intérêt, comme on pouvait s’y attendre de la part d’un physiologiste de sa valeur. Toute cellule réagit à une excitation d’intensité suffisante par un mouvement : ce sont les modalités diverses de ce mouvement qui seules nous permettent de juger des phénomènes qui ont pu se passer dans l’intimité de la cellule. L’étude de l’irritabilité, c’est donc l’étude des mouvements de la cellule : ces mouvements sont provoqués par toutes les forces extérieures pourvu qu’elles aient une intensité suffisante, ils sont d’autant plus intenses que l’excitation a été plus forte, mais seulement si l’on est placé dans des conditions identiques, car il faut tenir compte aussi de l’état où se trouve la cellule qui reçoit l’excitation. Tous ces mouvements sont des mouvements ondulatoires, « avec une période latente très brève, une période d’ascension assez courte et une période de descente très longue ». Ils durent beaucoup plus longtemps que n’a duré l’excitation et sont d’autant plus forts que cette excitation a été plus brusque.

Enfin des excitations qui, isolées, sont impuissantes à déterminer des mouvements, peuvent parvenir à en déterminer lorsque, se répétant, elles s’ajoutent les unes aux autres : c’est le phénomène de l’addition latente, que M. Richet a réussi à expliquer très clairement grâce aux schémas dont il s’est servi. Chez les êtres doués d’un système nerveux, tantôt le mouvement succède immédiatement à l’excitation, on a alors affaire au mouvement réflexe, tantôt il ne lui succède qu’à un long intervalle, c’est le cas des mouvements instinctifs et volontaires ; aussi semblent-ils spontanés. M. Richet ne se prononce pas sur la question des localisations cérébrales : il fait simplement de l’encéphale le siège de l’intelligence consciente, mais il étudie avec quelque détail les conditions qui modifient l’état du système nerveux (circulation, respiration, nutrition, température, âge, maladies, sommeil) ; il examine aussi l’action des poisons. Le rôle essentiel du système nerveux c’est de transmettre à distance les excitations ; tandis que, chez l’être simple, la cellule, c’était un seul et même organe qui servait à la fois aux diverses fonctions, chez les êtres plus développés ce sont des organes distincts qui sont employés à recevoir les excitations et à les transmettre, d’autres organes encore qui servent au mouvement. Les êtres qui possèdent ces organes différenciés peuvent accomplir des mouvements réflexes : le caractère commun à tous les réflexes, c’est d’être « un mouvement involontaire succédant immédiatement à une irritation périphérique[1] ».

  1. Psych, gén., p. 61.