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sécrétion biliaire. La peur produit une sécrétion intestinale, diarrhéique, abondante ; elle suspend la sécrétion salivaire, etc.

A la rigueur on pourrait prétendre que ces mouvements ne sont pas réflexes, et dire qu’ils sont produits, non par l’excitation extérieure elle-même, mais par l’affection de l’âme qu’a provoquée cette excitation. Mais il me paraît que cette distinction est subtile et qu’elle ne change rien à la nature réflexe du phénomène.

Voici telle histoire érotique, je suppose, qui détermine lérection. L’érection est caractérisée par la dilatation des vaisseaux, artérioles, capillaires et veinules, de la verge. Il s’agit là évidemment d’un acte réflexe, puisque la cause du phénomène est, au point de vue purement physique, une excitation rétinienne (lecture d’un livre érotique). Cette lecture, en tant que phénomène visuel brut, ne représente assurément rien qui puisse provoquer l’érection ; mais elle évoque aussitôt certaine affection de l’âme qui fait que les vaso-moteurs de la verge et des corps caverneux sont paralysés. Il y a là une succession d’idées, un mécanisme intellectuel entrant en jeu, dont la fatalité est égale à la fatalité d’un réflexe quelconque, dépourvu de toute ingérence intellectuelle ou psychique, comme le réflexe rotulien après le choc du tendon par exemple, ou la contraction de l’iris à la lumière. La seule différence, c’est que, dans le cas du réflexe rotulien, la réponse est simple, le mécanisme plus direct, et que la transformation de l’excitation sensible en excitation motrice ne présente aucune complexité, tandis que, dans le cas du réflexe érotique, il faut supposer une complication très grande et une élaboration intellectuelle très compliquée. Il faut que l’excitation, partant de la rétine, aille, après une série de transformations et de vibrations nerveuses, déterminer la paralysie des vaisseaux caverneux.

D’ailleurs l’exemple de l’érection va montrer comment le même phénomène peut être, suivant les cas, automatique, réflexe organique ou réflexe psychique.

En effet, dans quelques cas de lésion médullaire, ou de congestion de la moelle, l’érection survient spontanément, c’est-à-dire sans excitation périphérique appréciable. Il y a paralysie des vaisseaux caverneux par le seul fait de la lésion ou de l’irritation directe des centres nerveux. C’est alors un phénomène automatique, au même titre que l’innervation respiratoire est un phénomène automatique.

Dans d’autres cas, par exemple dans les paraplégies, quand la moelle a été sectionnée, ou détruite, l’irritation périphérique de la verge et du gland détermine le réflexe de l’érection, sans que la