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CH. SECRÉTAN.questions sociales

nul ne méconnaîtra l’obligation où l’État se trouve de veiller à sa propre conservation.

La journée normale n’est pas non plus incompatible avec les maximes classiques de l’Economie, pourvu que ces maximes soient appliquées par la raison qui les a découvertes et non par les intérêts particuliers. Pour l’augmentation de la richesse publique il vaudrait mieux, suivant son principe, que les conditions de la production ne fussent déterminées que par le concert et la concurrence des intérêts particuliers ; et c’est précisément pour cette raison que, dans une société donnée, où d’autres éléments ont altéré et altèrent encore ces conditions, il faut, s’il est possible, contre-balancer et neutraliser ces éléments perturbateurs aussi longtemps qu’ils ne seront pas éliminés et que leurs effets subsisteront.

II. L’internationalité de la loi.

La légitimité d’un maximum de durée obligatoire pour le travail des ateliers admise en principe, le dessein de l’appliquer fait surgir de nouveaux problèmes qui ne nous concernent pas tous également : une seule mesure de temps convient-elle à tous les genres de travaux ou faudra-t-il en établir plusieurs, et combien ? Si l’on peut se contenter d’un seul chiffre d’heures, quel sera-t-il ? — La discussion de ces points nous éloignerait de notre propos ; passons à d’autres : La durée du travail n’est-elle pas indissolublement liée au chiffre du salaire ? Est-ce que ces deux grandeurs ne croissent et ne décroissent pas nécessairement en même temps et, s’il en est ainsi, l’intérêt de l’ouvrier comporte-t-il une réduction de ce qu’il reçoit ? Ou bien les deux termes sont-ils séparables et, s’ils le sont, l’État peut-il intervenir dans les contrats pour prescrire un minimum de salaire, et peut-il régler le taux des salaires sans interrompre la production ou sans fixer lui-même le prix des produits ? L’industrie pourra-t-elle enfin, même en renonçant à tout bénéfice, trouver des acheteurs pour les produits aux prix que l’État aura fixés, s’il ne lui assure pas des consommateurs solvables, c’est-à-dire s’il n’interdit pas l’émigration et ne soumet pas le peuple entier aux travaux forcés ? Ces questions nous semblent se présenter dans une série assez naturelle. S’il fallait y répondre par autant d’affirmations, la journée normale du travail serait évidemment condamnée par ses conséquences aux yeux du libéralisme le moins exigeant, quelle que puisse être la valeur des motifs qui en ont suggéré la pensée. Au nom de la liberté véritable et pour en procurer l’avènement, on peut bien tempérer en un point donné les mauvais effets d’une liberté fictive par un pallia-