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Le résultat moteur final sera donc fonction de ces deux variables, d’une part la force inhibitrice de la volonté, d’autre part la force excitatrice de la stimulation. Aussi de fait toutes les transitions s’observent-elles ; car on peut concevoir toute une série de gradations entre les intensités de la volonté qui arrête, comme entre les intensités de l’excitation qui stimule.

Si la volonté est extrêmement forte, elle parviendra à réagir contre un excitant même assez intense. Mais, quelque puissante que soit la volonté, son influence sera vaincue, si l’excitant a beaucoup augmenté d’intensité. Comme la volonté ne peut pas croître indéfiniment, tandis que l’excitant réflexe peut croître presque indéfiniment, c’est toujours en définitive à l’excitation réflexe que reviendra la victoire, si cette excitation est très forte, et la volonté n’aura eu d’autre effet que de retarder le moment où s’est produit le mouvement.

Nous avons jusqu’ici considéré la volonté comme une force d’arrêt antagoniste de l’excitant réflexe : c’est le cas le plus général ; mais parfois elle peut produire le même effet que l’excitant, et aller dans le même sens. Autrement dit, elle est parfois, non une cause d’inhibition, mais une cause d’excitation surajoutée à l’excitant réflexe ; de sorte qu’elle peut finir par remplacer l’excitant, et être elle-même le mobile du mouvement.

En résumé, nous avons les modalités suivantes :

1o Un excitant sans volonté….. un mouvement ;

2o Un excitant avec volonté contraire….. pas de mouvement ;

3o Un excitant très fort avec volonté contraire….. mouvement ;

4o Un excitant très faible ou nul, avec volonté dans le même sens….. un mouvement.

Ce schéma a l’avantage de pouvoir s’appliquer à tous les réflexes psychiques, aussi bien qu’au réflexe non psychique de la toux.

Prenons pour exemple le cri réflexe de la douleur. Quand une douleur aiguë nous atteint, nous donnons, en même temps qu’une sorte de grimace convulsive, un cri involontaire qui est franchement réflexe.

Eh bien ! ce cri peut être, à presque tous les degrés, empêché par la volonté ; de sorte que l’arrêt du cri réflexe de la douleur mesure pour ainsi dire la force de notre volonté. Ce critérium a été adopté par le langage usuel, si bien qu’on attribue aux divers individus une volonté faible ou forte, selon qu’ils ont, ou non, la force de suspendre le cri involontaire de la douleur.

Cette classification est très exacte. Les nouveau-nés crient dès qu’ils souffrent ; les enfants, les femmes nerveuses font de même,