Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXV, 1888.djvu/54

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
44
revue philosophique

ne vois pas pourquoi cette influence ne serait pas balancée par l’exemple de ceux qui écrivent mal ; si ce n’était que cette dernière influence est annulée ou diminuée par le désir de bien écrire. L’écrivain désire arriver à faire une œuvre qui le satisfasse, et les phénomènes psychiques s’arrangent dans un ordre déterminé par cette cause finale en dépit de la similarité et de la contiguïté. Cette cause d’ailleurs ne peut pas s’expliquer elle-même par les lois de l’association, autrement il faudrait également expliquer la cause de la cause et remonter ainsi jusqu’au germe, et de là jusqu’au premier organisme dont nous ne savons rien. Nous retombons ainsi d’ailleurs dans un cas précédemment examiné, et nous arrivons encore à trouver l’organisation physiologique comme la base et la cause de l’organisation psychique.

Un dernier argument en faveur de l’associationnisme consisterait à dire que les différentes associations ont au moins ceci de commun que ce sont des associations par finalité et que c’est cette ressemblance qui explique leur mécanisme. Une pareille interprétation plus subtile que solide se heurterait contre les objections générales que nous avons exposées plus haut, ou bien elle ne signifierait pas autre chose que ceci : la finalité est la loi générale de groupement des phénomènes psychiques.

Que la loi de finalité qui est inhérente au fonctionnement de l’esprit soit d’autant plus visible que les phénomènes psychiques sont d’un ordre plus élevé, cela n’a rien de surprenant, et même cela est une vérité plus qu’évidente, si l’on songe que la supériorité d’un phénomène ou d’un groupe de phénomènes se mesure précisément au degré de systématisation de ses éléments. Aussi est-ce dans les formes les plus élevées des fonctions mentales que les adversaires de l’associationnisme ont puisé leurs arguments. Toutefois il ne faudrait pas en conclure que les formes inférieures ne révèlent pas encore une certaine harmonie, et même cette harmonie, si elle est souvent moins parfaite en ce qu’elle résulte du consensus d’un moins grand nombre d’éléments, est aussi quelquefois de nature supérieure, en ce que les éléments sont mieux unis et mieux unifiés en vue d’une action une. Cette harmonie éclate dans les actions réflexes composées et dans l’instinct.

Les phénomènes moins complexes qui s’accompagnent de conscience, comme la perception, l’imagination, etc., témoignent aussi d’une certaine harmonie qui ne parait pas réductible à l’association par contiguïté et ressemblance. C’est ce qui ressort clairement des théories d’après lesquelles tout phénomène psychique, toute sensation par exemple, est le résultat d’une sorte de raisonnement inconscient.