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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXI, 1891.djvu/465

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e. de roberty. — de la théorie de la connaissance

développées, et les autres tout aussi particulières ou se rapportant à des phénomènes nerveux et cérébraux encore à l’étude. On oublie enfin que si la science retient et s’applique à vérifier pareille hypothèse, c’est précisément en raison du caractère spécial qu’elle lui attribue. Elle peut dès lors facilement la confronter avec des faits concrets et particuliers (expériences sur l’ablation des différentes parties du cerveau, expériences cliniques, hypnotiques, etc.).

Je ne veux pas, du reste, insister trop longtemps sur ce point. Le paradoxe consistant à dire que l’identité des hypothèses directrices du matérialisme et de la physiologie du cerveau n’empêche pas ces suppositions d’être formellement distinctes, sinon même opposées l’une à l’autre, ce paradoxe apparent exprime une vérité de la plus haute importance. Car de l’hypothèse universelle à l’hypothèse particulière une différence semble exister en tout point comparable à celle journellement constatée entre la matière inorganique et le germe organisé. Quand bien même il y aurait identité parfaite entre la composition chimique de la parcelle brute et celle du plasma vivant, seul, le plasma pourrait se transformer, le cas échéant, en plante ou se développer en organisme animal. De même, l’hypothèse particulière possède seule quelque chance de devenir un jour une vérité scientifique. Et, certes, le physiologiste se rallierait immédiatement à l’hypothèse idéaliste, s’il pouvait croire que la balance des probabilités expérimentales penche en faveur de celle-ci. La physiologie du cerveau n’en continuerait pas moins à rester une science, avec toutes ses vérités déjà établies et ses méthodes éprouvées. Mais que deviendrait le matérialisme, s’il lui fallait échanger son hypothèse fondamentale contre celle de l’idéalisme ?


Laissons ces deux non-valeurs, le matérialisme et son hypothèse universelle, et limitons-nous à la science spéciale et à son hypothèse particulière.

Nous avons dit que la balance des probabilités expérimentales penchait visiblement du côté de l’opinion qui considère les phénomènes de conscience comme intégralement réductibles, en première ligne, aux phénomènes inconscients, et ensuite, aux événements extérieurs, aux faits du monde objectif. Ne nous attardons pas à regretter le caractère incertain et hypothétique de cette doctrine. Il nous est impossible de sortir, non seulement de l’ensemble du cosmos, comme le démontrent gravement certains philosophes, mais encore des limites du temps où nous vivons, et des limites des connaissances acquises à notre époque. À cela se borne la seule relativité du savoir que nous puissions raisonnablement admettre.