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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXI, 1891.djvu/531

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ANALYSES. — Liébeault. Thérapeutique suggestive.

chagrins continus minent les constitutions les plus robustes et de quelles affections ils peuvent être la cause.

Il ne suffit pas de savoir comment les maladies prennent naissance par action morale, il faut encore connaître comment elles guérissent par la même cause. Il faut saisir les conditions des guérisons par réaction de la pensée sur l’organisme, afin de connaître les modes fonctionnels de ces guérisons, leur loi. S’il est prouvé que l’on peut artificiellement faire naître, pour obtenir des guérisons, les mêmes prédispositions psychiques et les mêmes réactions morales en sens inverse que celles qui favorisent la formation d’un grand nombre de maladies et se mettre, par conséquent ainsi, dans les conditions de la nature curatrice par influence morale, le moyen rationnel de guérir par l’intermédiaire de la pensée ne peut tarder à entrer dans la science.

Les cures par réaction de la pensée sur l’organisme se rapportent à trois types qui correspondent aux trois groupes de maladies admis dans le premier chapitre. Je n’entrerai pas dans le détail des faits et des réflexions qui se groupent sous ces trois catégories ; il suffit d’avoir indiqué les principes sur lesquels s’appuie l’auteur et le parallélisme qui se continue sur ce point entre les deux premiers chapitres du livre.

Dans le troisième chapitre, M. Liébeault étudie le mécanisme intime des guérisons pendant le sommeil et spécialement dans le sommeil provoqué. Dans cet état le fait essentiel c’est que l’endormeur a la facilité de pouvoir offrir des idées à l’attention de son somnambule et de faire réagir ainsi cette faculté dans le sens qui lui plaît.

Quelles sont maintenant les conditions subsidiaires qui font que l’on obtient des modifications telles sur l’économie que des accidents morbides prennent naissance ou disparaissent ? Ces conditions sont la crédulité native et l’impuissance dans laquelle se trouve le dormeur de faire des efforts de volonté et d’intelligence, parce qu’il est en idée fixe. Ce sont là les deux éléments secondaires de la détermination des guérisons ; l’un aide l’autre.

Ceci suggère à M. Liébeault les réflexions suivantes : « En considérant la torpeur d’esprit des dormeurs, nous nous sommes demandé souvent si la crédulité et l’incrédulité n’ont pas leurs racines dans un même fonds commun, dans une inertie de l’attention qui fait que l’un, le crédule, admet sans contrôle ce qu’on lui dit ; et l’autre, l’incrédule, nie ce qu’on lui avance, par une même paresse d’examiner. »

« Les faits donnent raison à notre conjecture. D’un côté, les hommes impuissants, par inertie de l’attention, à combiner des idées, peser des motifs, tels sont les idiots et les pesants, sont excessivement faciles à tromper, et, de l’autre, ceux qui par perte de ressort de cette faculté, tombent dans une idée fixe comme les fous et certains savants, sont très incrédules au contraire, parce qu’ils ne peuvent plus se débarrasser des convictions étroites qui les enchaînent ; ils font corps avec elles et, par cela même, rejettent l’examen des faits vraisemblables ne rentrant