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LA FRANCE COLONIALE

nie et sa contribution annuelle de 13.500.000 francs au budget de la métropole. C’en est assez pour apprécier l’étendue des résultats acquis.

Ces résultats semblent pourtant infimes en comparaison des promesses de l’avenir. L’Indo-Chine apparaît comme une mine inépuisable où nous avons seulement donné quelques coups de pioche !

Les Français, qui commencent à le comprendre, attachent dès lors un très grand prix à la conservation de cette admirable possession. L’ayant jugée menacée par le progrès de l’impérialisme japonais, ils ont placé au premier rang la question de sa défense militaire. Comment défendre l’Indo-Chine ? un fait domine toutes les considérations stratégiques : nous n’y parviendrons jamais sans le loyalisme indigène. La politique locale joue ici un rôle primordial.

Nous avons affaire à des populations très civilisées qui sont à même de nous comprendre et de juger notre œuvre : elles s’attacheront à nous dans la mesure où nous aurons su mériter leur gratitude. C’est à leur propos que s’affirme dans toute son ampleur la valeur de « l’association ». Loin de vouloir nous les assimiler moralement et intellectuellement, respectons largement leurs mœurs et leurs coutumes, utilisons leur collaboration effective au gouvernement et au progrès du pays et sachons leur faire partager les bénéfices de sa rénovation. Il faut qu’ils se rendent compte que nous les protégeons sans chercher à les asservir, que leurs intérêts sont les nôtres : ils deviendront alors pour nous les auxiliaires les plus confiants et les plus sûrs contre toute agression de l’étranger.

À présent il me semble que le sentiment de ce péril ne doit pas être exagéré. Quelques écrivains nous l’ont montré très imminent du côté japonais ; leur erreur est flagrante à mes yeux. J’ai rapporté d’un récent séjour en Extrême Orient et au Japon même une opinion absolument contraire. Les hommes d’état nippons m’ont paru beaucoup trop avisés pour se lancer dans une aventure qui révolutionnerait l’Extrême-Asie entière, ils ne songent qu’à entretenir de bonnes relations avec la France, à réparer leurs forces en profitant pacifiquement des avantages de leurs victoires. Leur prêter un dessein aussi absurde que celui d’une expédition armée contre l’Indo-Chine est leur faire une injure gratuite : nous savons qu’ils ne la méritent pas.