Page:Revue pour les français, T2, 1907.djvu/189

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
617
LES ÎLES PHILIPPINES EN 1907

grecque. Scipion Émilien, au contraire, demeurait très romain dans ses allures. Son philhellénisme se tenait dans les régions intellectuelles et ne s’abaissait point aux détails matériels. Mais par la suite, ces détails prirent le pas sur l’essentiel ; le vêtement, les manières, la forme des entretiens, choses que les usages romains avaient fixées dès longtemps et de façon assez formaliste parce que la moindre dérogation en devint immédiatement sensible, tout cela s’hellénisa. C’est alors que l’opinion populaire se rendit compte du mouvement et par là s’explique que la postérité n’ait aperçu d’abord que cette forme d’hellénisation — la seconde en date et qu’elle ait longtemps négligé la première et la plus conséquente. Qu’importerait après tout que Rome eût adopté les modes grecques si elle ne s’était pas préalablement nourrie du suc des idées grecques ? En s’hellénisant quant à la forme (très lentement du reste et non sans de fécondes résistances du vieil exclusivisme national), Rome perdit ses forces au lieu d’en gagner.

Il en est toujours ainsi lorsqu’un grand peuple renonce à ce qu’on pourrait appeler ses « traditions de détail » pour adopter des traditions étrangères. Alors que l’emprunt de doctrines d’ensemble, d’idées directrices, de principes supérieurs d’un peuple à l’autre, conduit plus souvent à de sages rénovations qu’à de regrettables déchéances, l’inverse est vrai des habitudes caractéristiques de la vie quotidienne. En y renonçant, la nation semble abandonner quelque chose de sa puissance organique. Ainsi en fut-il de Rome. La Grèce contribua de la sorte à la décadence de l’Empire, tandis que l’hellénisation intense, mentale, qui s’était accomplie au temps de la République avait préparé le ciment de la civilisation générale et décidé par là des destins favorables de l’Europe et d’une partie de l’Univers.


Séparateur


LES ÎLES PHILIPPINES EN 1907



« La bataille de Manille et l’annexion des Philippines nous ont placé au premier rang pour la domination du Pacifique ; poursuivons-y bravement notre œuvre et nous deviendrons bientôt la première puissance, non seulement du Pacifique mais du monde entier ».