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REVUE POUR LES FRANÇAIS

Ces paroles, prononcées par un diplomate américain en séance solennelle de la Société nationale de géographie de Washington, justifieraient suffisamment l’opportunité de cette étude. Un pays à propos duquel une puissance telle que les Etats-Unis exprime d’aussi brillants espoirs mérite sans doute d’être connu. Celui-là en est digne, en soi, à bien d’autres égards : sa nature, ses populations, sa géographie, son histoire en ont fait l’un des plus intéressants et des plus attrayants qui soient au monde.

Un archipel squelette

Au moment d’écrire cet article, nous avons placé sous nos yeux un planisphère sur lequel se détache, en jaune clair, le petit groupe des Philippines. Le hasard d’un mouvement brusque vient de déplacer notre atlas : nous voyons à présent la carte en diagonale et nos regards la parcourent du sud-ouest au nord-est. Considéré suivant cette direction, l’archipel jaune nous apparaît sous la forme très nette d’un squelette d’animal antédiluvien. Ses différents organes — tête, bassin, pattes, etc., — sont absolument caractérisés. Toutes les îles qui le composent semblent les parties nécessaires d’un même corps : en retrancher une quelconque ou y ajouter quelque voisine romprait immédiatement cette unité d’aspect voulue par la géographie, respectée par l’histoire.

Environnées de mers profondes dont les abîmes dépassent 4.000 et 6.000 mètres, les Philippines, d’ailleurs, semblent parfaitement isolées. En réalité, elles se rattachent directement — par un même piédestal sous-marin — aux pays d’alentour, et, par leurs ramifications, à l’Asie et à l’Océanie continentales. Elles font partie de ce chapelet d’îles volcaniques qui, commençant avec les Kouriles, traverse le Japon, Formose, les Philippines, les Célèbes, les Moluques, etc., pour aboutir à la Nouvelle-Zélande. Toutes ces terres ont la même origine et se sont trouvées séparées, emiettées par les mêmes influences.

L’archipel des Philippines possède encore aujourd’hui douze grands volcans en pleine activité. Les frémissements du sol n’y discontinuent pas et le sismographe de l’observatoire de Manille est perpétuellement en mouvement ; nulle part, sans doute, ces convulsions du sol n’ont causé de tels bouleversements. Inutile, pour le vérifier, de remonter loin dans le passé : nous savons qu’en 1627 une haute montagne disparut ainsi subitement ; quelques