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ANALYSES. — A. DE ROBERTY. La Sociologie.

telle que la conçoivent les positivistes est plus apparente que réelle, et, si l’on ne considère que les faits eux-mêmes, les deux théories sont bien près de s’accorder. Seulement, tandis que les uns se contentent de distinguer trois groupes de propriétés, quantitatives, physiques et chimiques, le philosophe anglais s’efforce de ramener la biologie à la chimie, la chimie à la physique. Or la réalité des phénomènes et leurs transformations possibles sont objet de métaphysique, non de science. « Notre science et notre philosophie n’ont affaire ni à la force unique, ni à la cause unique, ni à l’espace unique, ni au temps unique, ni à aucun absolu, de quelque manière qu’on s’ingénie à le déguiser. » Il y aurait bien à dire, croyons-nous, sur cette interprétation de la doctrine de l’évolution, et aussi sur ces propriétés prétendues irréductibles d’une matière inconnue, pour lesquelles certains positivistes professent encore de nos jours un respect superstitieux.

III. La division de la sociologie. — Au début d’une science à peine constituée, il est difficile de diviser et de grouper les faits qu’on ne connaît encore qu’incomplètement, Toutefois une division provisoire est nécessaire, et il faut l’établir à posteriori. La meilleure ici serait fondée sur les formes diverses de l’association.

Mais, bien que l’on ne puisse espérer dès maintenant transformer l’histoire naturelle des sociétés en science véritable, c’est encore à la division d’Auguste Comte qu’il faut s’arrêter. On distinguera donc la statique sociale ou étude des conditions d’existence et d’équilibre des sociétés, et la dynamique sociale où étude des conditions de mouvement et d’évolution des sociétés. Cependant cette division, théoriquement excellente, n’a que peu de valeur dans la pratique, car la science sociale n’est pas encore assez avancée pour qu’il soit possible de séparer l’une de l’autre dans une étude ces deux sortes de conditions. Aussi M. de Roberty propose-t-il une autre division provisoire plus féconde : anatomie des corps sociaux (morphologie ou biostatique) ; physiologie des corps sociaux (biodynamique) ; enfin pathologie des corps sociaux, Des subdivisions ultérieures pourraient être créées à la suite du progrès de ces sciences, mais dès aujourd’hui il faut pousser aussi loin que possible l’analyse des associations et ne plus attacher aux grandes fonctions sociales l’importance que l’on attribuait autrefois en biologie aux organes apparents. C’est dans l’étude des derniers éléments que l’on cherche maintenant la raison des composés.

IV. Questions connexes. — Dans cette dernière partie sont traitées différentes questions. Deux surtout, et par leur importance propre, et par celle des solutions proposées, méritent une attention spéciale, les questions des rapports de la science sociale avec la biologie d’une part, avec la psychologie de l’autre.

Les sciences du monde inorganique ont pour objet le milieu dans lequel s’opère l’évolution de la série organique qui a pour terme l’humanité. Or la biologie, qui étudie le mode individuel de l’existence organique, ne saurait être séparée de la sociologie, qui en étudie le mode