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NOTICES BIBLIOGRAPHIQUES



Léopold Bresson. — Idées modernes. Cosmologie, sociologie. Paris, C. Reinwald. 1880 (in-16, vii-357 p.).

L’auteur s’intitule ancien élève de l’École polytechnique ; c’est un homme âgé, qui, après une honorable carrière d’ingénieur, consacre les loisirs de sa vieillesse à vulgariser les idées scientifiques, cosmologiques et sociologiques, au courant desquelles il a su se tenir. Le sous-titre du livre indique suffisamment qu’il est écrit au point de vue positiviste ; quoiqu’au reste M. Bresson ne paraisse pas avoir subi l’influence personnelle d’Auguste Comte et qu’il en juge l’œuvre avec une pleine indépendance, on peut dire qu’il se trouve à égale distance des deux écoles distinctes où se sont groupés les disciples du maître. Mais il ne s’est astreint à jurer par aucune parole ; il a fait une large part aux travaux et aux opinions d’Herbert Spencer.

Un esprit aussi ouvert, mûri par l’âge, mais conservant les généreux sentiments de la jeunesse, d’ailleurs possédant toute la compétence scientifique nécessaire, devait faire un excellent résumé de la doctrine positiviste. Intéressant pour les gens du monde, suffisamment profond pour les savants, ce résumé peut être utile pour les philosophes des autres écoles ; j’ajouterai même que les négations du point de vue religieux y sont présentées avec assez de mesure pour qu’il n’y ait aucun inconvénient à le mettre entre des mains d’élèves.

M. Bresson a d’ailleurs eu la modestie de ne parler en son propre nom que très rarement, et nous sommes par là dispensés de discuter ses opinions personnelles, d’autant que, si sur les points de détail on ne peut que louer, en général, ses remarques judicieuses, sur les questions qui prêtent aux controverses philosophiques, il se tient dans une sceptique réserve et se laisse même aller c’est là le seul reproche que nous lui ferons, à des contradictions.

Ainsi nous lisons p. 19 : « La matière nous apparaît donc comme infinie dans le temps. Elle ne l’est pas moins dans l’espace, qu’elle remplit sous la forme d’astres et de nébuleuses. » Et plus loin, p. 76 Nous voyons qu’elle peut ne pas être et qu’elle n’est point, en effet, une quantité infinie dans l’univers. Y a-t-il d’un côté l’opinion de Comte, de l’autre celle de Spencer ? Il eût en tout cas été préférable de préciser chaque fois qu’il y a là une question douteuse et deux hypothèses également soutenables.

Je ne m’arrêterai pas à la partie de l’ouvrage relative aux sciences mathématiques, physiques et naturelles ; on sait que l’œuvre de Comte à cet égard n’est plus en rapport avec les progrès de la science. Le