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P. Hochart.Études sur la vie de sénèque. Paris, Ernest Leroux, 1885.

Ce livre avait été d’abord publié en Hollande sous le titre de Sénèque et la mort d’Agrippine et sous le pseudonyme de H. Dacbert. La flatteuse bienveillance avec laquelle des maîtres éminents et des savants distingués ont bien voulu juger l’ouvrage a décidé l’auteur à le publier dans notre pays et à le signer de son nom.

Il a été amené, par la lecture des ouvrages de MM. Havet, Martha et Aubertin, à étudier les œuvres de Sénèque, à rechercher de quels principes découlaient les opinions émises par lui, par quels liens communs elles se rattachaient entre elles. Il a été frappé de l’accent de conviction qui se manifeste chez Sénèque, et il a été conduit à penser que Montaigne a pu avoir raison d’affirmer que les accusations dont il a été chargé ne sont que de pures calomnies. Il a examiné et pesé les témoignages de Tacite, de Suétone, de Dion Cassius, de Pline l’Ancien, de Quintilien, de Juvénal, et il est demeuré convaincu qu’on doit voir dans Sénèque

L’accord d’un beau talent et d’un beau caractère.

C’est pourquoi il demande la révision de son procès et la réhabilitation de sa mémoire.

Le livre contient deux études ; la première traite des Stoïques sous les Césars, la seconde de Sénèque et de la mort d’Agrippine.

Nous nous bornerons à signaler dans la première étude le chapitre où l’auteur expose la doctrine stoïcienne en général et la doctrine de Sénèque. Il connaît les Latins et un certain nombre des ouvrages qui traitent de la philosophie romaine : Lucrèce, Cicéron, Sénèque, Pline, Lucain, Perse, Tertullien, Saint Jérôme, Saint Augustin, Montaigne, MM. Havet, Martha et Aubertin ; mais il semble ne connaître qu’imparfaitement le stoïcisme grec, dont la connaissance est cependant indispensable pour déterminer le sens et l’originalité du stoïcisme romain ; il semble, d’une manière générale, ne connaître la philosophie ancienne que de seconde main et avoir puisé à une source assez mauvaise. C’est ainsi qu’il donne la division de la philosophie en logique, physique et morale, qui date de la fin du IVe siècle avant Jésus-Christ comme généralement acceptée chez les anciens ; qu’il considère la physique comme comprenant deux parties, la physique naturelle (?) et la métaphysique ; qu’il ne se rend pas un compte exact des essais de retour au cynisme qui tendaient, même à Rome, à faire revenir le stoïcisme à ses origines, des doctrines métaphysiques qui amenèrent les stoïciens à condamner l’esclavage, de la théorie stoïcienne sur la liberté et sur l’état de l’âme après la mort, qu’il confond, l’une avec le libre arbitre dont les Écossais ont montré l’existence au moyen de l’analyse psychologique (p. 20), l’autre avec la théorie épicurienne d’après laquelle l’âme périt en même temps que le corps (26). Il nous dit encore que les phénomènes de la nature étaient, de la part des philosophes romains,