Page:Ricard Saint-Hilaire - Le Moine et le Philosophe, 1820, tome 2.djvu/53

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des déserts, elle s’enivrait des délices du Delta ; elle pleurait la Cavale aux yeux de gazelle, soupirait avec la sœur du calife ou l’amante du poëte ; et, sans le croire, ces soupirs donnés à l’infortune, qui n’était pas la sienne, lui étaient arrachés par un sentiment plus vif de sa propre faiblesse ; mais ces soupirs étaient sans désolation ; le cœur, en les exhalant, en perdait la mémoire. Le bonheur actuel effaçait les terreurs de l’avenir. Ainsi l’amour, la couvrant de ses voiles, dérobait le malheur à ses yeux, et lui promettait des jours filés d’or et de soie : hélas ! a-t-il jamais tenu ses promesses ! Quand il sème des fleurs, n’est-ce pas pour tromper ! Il vous ouvre une route charmante ; vous marchez, les fleurs vous laissent dans les ronces. Chrétiens ! pourquoi ces regards toujours fixés sur la terre ? qu’y verront-ils ? espérances vaines, regrets du passé, plaisirs dans les jours qui ne sont pas encore,