Page:Ricard Saint-Hilaire - Le Moine et le Philosophe, 1820, tome 4.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 80 )

leurs têtes vers la voûte, comme pour atteindre plutôt à la liqueur désirée ; mais, hélas ! l’impitoyable baron gardait pour lui le jus patriarchal, arraché à la vigne par le bon père Noé.

Le choc des verres et des bouteilles, la détonation des flacons, dont les bouchons étaient repoussés par la liqueur effervescente, les chants joyeux des heureux convives, et surtout l’avoine ecclésiastique qui picotait les entrailles des bons pères, irritaient leur soif brûlante ; c’est dans des tourmens égaux à ceux de Tantale qu’ils écoutèrent la chanson suivante :


Chacun a son goût dans le monde,
Et chaque pays a ses mœurs ;
Les goûts de l’un, l’autre les fronde,
Vos plaisirs seraient mes douleurs.
Aimez le jeu, je le déteste ;
Chassez, je hais le bruit du cor.
Je fuis l’amour comme la peste,
Ma gaîté, voilà mon trésor.

En tout temps, divisés sur l’honneur et la gloire,
Sur les dieux, les chevaux, les femmes, les amours,