Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/188

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nécessairement sur la quantité de ces produits, ni sur le nombre des individus qui ont les moyens de les acheter et la volonté de les consommer. Il est très-aisé de voir pourquoi, lorsque le capital d’un pays s’accroît d’une manière irrégulière, les salaires haussent tandis que le prix du blé reste stationnaire, ou baisse dans une moindre proportion, et cela pendant un espace considérable de temps : c’est parce que le travail est une marchandise qu’on ne peut augmenter ou diminuer à volonté. Si dans le marché il y a trop peu de chapeaux pour satisfaire à la demande, leur prix montera, mais ce ne sera que pour peu de temps ; car dans le cours d’un an, en consacrant un plus fort capital à cette fabrication, on peut augmenter la fourniture des chapeaux, de telle sorte que leur prix courant n’excède pas longtemps leur prix naturel. Mais il n’en est point de même des hommes ; on ne peut pas en augmenter le nombre dans un ou deux ans, aussitôt qu’il y a une augmentation de capital ; pas plus qu’on ne peut en diminuer le nombre lorsque le capital va en décroissant ; par conséquent le nombre des bras n’augmentant ou ne diminuant que lentement, pendant que les fonds destinés à l’entretien des travailleurs s’accroissent ou diminuent rapidement, il faut nécessairement qu’il y ait un intervalle de temps considérable avant que le prix de la main-d’œuvre soit exactement en rapport avec le prix du blé et des articles de première nécessité Mais dans le cas de la dépréciation de la monnaie ou dans celui d’un impôt sur le blé, il n’y a nécessairement ni excès, ni insuffisance des travailleurs, et par conséquent il ne peut y avoir de cause pour que l’ouvrier éprouve une diminution de salaire.

Un impôt sur le blé n’en diminue pas nécessairement la quantité ; il ne fait qu’en augmenter le prix en monnaie. Un pareil impôt ne diminue pas nécessairement la demande de bras comparée à l’offre ; pourquoi donc diminuerait-il la part qui est payée au travailleur ? Supposons que cet impôt diminue en effet la part du travailleur, ou, en d’autres termes, qu’il ne fasse pas hausser ses profits évalués en monnaie, en proportion de la hausse que l’impôt a produite dans le prix du blé que consomme le travailleur ; dans ce cas l’approvisionnement ou l’offre de blé n’excéderait-elle pas la demande ? le blé ne baisserait-il pas de prix ? et conséquemment le travailleur n’obtiendrait-il pas sa part ordinaire ? Dans un tel cas, on détournerait à la vérité les capitaux de leur emploi dans l’agriculture ; car si le prix des produits ne haussait pas de tout le montant de l’impôt, les profits du cultivateur deviendraient moindres que le taux général des pro-