Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 2, 1916.djvu/400

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rent enlevés, les Anglais arborèrent pavillon sur les églises, et en firent des casernes pour servir de passage à leurs troupes.

« Les missionnaires arrivèrent donc à Halifax dans ce bel accompagnement, tambour battant. On les conduisit sur la place d’armes où ils furent exposés pendant trois quarts d’heure aux railleries, mépris et insultes. »

Les documents officiels, tronqués comme ils le sont, ne nous font voir qu’une faible partie de l’oppression exercée par Lawrence ; il n’en serait guère autrement même s’ils étaient complets : un despote n’enregistre pas ses méfaits, surtout lorsqu’il est sous le contrôle d’une autorité supérieure et qu’il joue une partie à l’insu de cette autorité. Il semble, d’après ce que nous connaissons, que Lawrence se complaisait dans son rôle de tyran, qu’il prenait plaisir à faire trembler sous son regard de pauvres gens qui ne pouvaient lui opposer que le silence. Il n’y avait qu’un parvenu pour pousser aussi loin l’abus de son pouvoir sur un simple refus de se prêter à un acte qui répugne à la nature ; et, si l’on en croit Daudin, il avait eu le soin de rendre ce serment plus répugnant encore en intimant aux Acadiens qu’ils auraient à combattre contre les Français. Évidemment, il tenait à échouer.

Cette lettre de Daudin vient confirmer le rapport de Morris sur l’ancienneté des intentions de Lawrence. Bien avant la prise de Beauséjour, soit qu’il eût avoué, soit qu’il eût laissé deviner ses projets à son entourage, — l’on disait aux Acadiens qu’on les disperserait, qu’on brûlerait leurs maisons[1]. Dans ces petites communautés régies par un des-

  1. Dans l’édition anglaise (II. 55.) le chapitre XXVII se termine ici. Il semble donc que ce soit après que la traduction de son ouvrage eût été achevée