Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/211

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mes ; en hiver, ils coupaient du bois pour leur chauffage et leurs clôtures, et faisaient la chasse ; les femmes s’occupaient à carder, filer et tisser la laine, le lin et le chanvre que ce pays fournissait en abondance. Ces objets, avec les fourrures d’ours, de castor, de renard, de loutre et de martre, leur donnaient non-seulement le confort, mais bien souvent de jolis vêtements. Ils leur procuraient aussi les autres choses nécessaires ou utiles au moyen du commerce d’échange qu’ils entretenaient avec les Anglais et les Français. Il n’y avait pas une maison où l’on ne trouvât pas une barrique de vin de France. Ils n’avaient d’autres teintures que le noir et le vert ; mais afin d’obtenir du rouge dont ils étaient remarquablement épris, ils se procuraient des étoffes rouges anglaises, qu’ils coupaient, échiffaient, cardaient, filaient, et tissaient en bandes dont étaient ornés les vêtements des femmes. Leur pays était tellement abondant en provisions que j’ai entendu dire qu’on achetait un bœuf pour cinquante chelins, un mouton pour cinq, et un minot de blé pour dix-huit deniers. On n’encourageait pas les jeunes gens à se marier à moins que la jeune fille ne pût tisser une mesure de drap, et que le jeune homme ne pût faire une paire de roues. Ces qualités étaient jugées essentielles pour leur établissement, et ils n’avaient guère besoin de plus, car chaque fois qu’il se faisait un mariage, tout le village s’employait à établir les nouveaux mariés. On leur bâtissait une maison, défrichait un morceau de terre suffisant pour leur entretien immédiat ; on leur fournissait des animaux et des volailles ; et la nature, soutenue par leur propre industrie, les mettait bientôt en moyen d’aider les autres. Je n’ai jamais entendu parler d’infidélité dans le mariage parmi eux. Leurs longs et froids hivers se pas-