Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/321

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cawen avait peut-être quelque conscience et certains principes d’honneur.

Trois ou quatre mille de ces infortunés Acadiens furent jetés pêle-mêle à fond de cale, dans des navires rassemblés à la hâte, sans égard à leur condition ou à leur destination, et dirigés vers l’Angleterre. Quel fut leur sort ? Nous l’ignorons, ou plutôt nous n’en pouvons former que des conjectures plus ou moins satisfaisantes. Leur destination était probablement l’Angleterre et non la France, puisque la guerre entre ces deux nations battait alors son plein. Cependant, d’après les relevés faits en Angleterre après la Paix, par M. de la Rochette, nous avons lieu de croire que grand nombre d’entre eux furent transportés directement en France. Nous savons que M. de Ville joint, qui commandait au Fort Lajoie avant la reddition de l’Île, put en prendre avec lui 700, qu’il débarqua à La Rochelle. D’autre part nous savons que le 26 décembre 1758, un navire poussé par la tempête entra dans le port de Boulogne-sur-Mer : 179 personnes en descendirent. Il est à peu près avéré qu’un ou deux navires auraient sombré en mer.

Un de ces naufrages est raconté comme suit par un certain capitaine Pile, commandant du navire Achilles vers la fin du siècle dernier : « Le capitaine Nichols, dit-il, commandant un transport venant d’Yarmouth, fut employé par le gouverneur de la Nouvelle-Écosse pour enlever de l’Ile Saint-Jean trois cents Acadiens, avec leurs familles. Avant de mettre à la voile, il représenta à l’agent du gouvernement qu’il était impossible que son navire, dans l’état où il était, pût arriver sans danger en France, surtout à l’époque avancée de la saison où l’on se trouvait. Malgré ses représentations, il fut forcé de recevoir les Acadiens à son