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Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/372

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de leur représenter que les Acadiens étaient des êtres dangereux, sans cesse occupés à comploter contre la sûreté de l’État. Pouvaient-ils, sans être instruits des agissements et des motifs des représentants de leur autorité, se refuser à croire que les considérations que ceux-ci leur soumettaient, étaient motivées par l’intérêt public ! Et cependant, en dépit des affirmations constantes et des supercheries de ces gouverneurs, ne voyons-nous pas les Lords pencher toujours dans un sens opposé, plus conforme à l’humanité et à la justice ? Il nous semble bien, il est vrai, qu’en ce qui concerne Wilmot, il devait être facile de discerner qu’il y avait tromperie préméditée, cruauté mal déguisée, mais, peut-être aussi que Lord Halifax avait l’âme trop haute, des intentions trop pures pour soupçonner de pareilles infamies.

Étrange coïncidence des choses humaines ! Wilmot qui se frottait les mains de joie à l’idée que le climat des Antilles allait tuer les Acadiens, demandait lui-même, un an après leur départ, un congé d’absence pour récupérer sa santé que le climat mettait en péril. « Les durs hivers qui règnent dans l’Amérique du Nord ont accentué la goutte dont je souffre… Mes amis et les médecins m’assurent que je ne pourrai passer un autre hiver en ce pays[1]. » Comme Lawrence et Boscawen il ne devait pas jouir de ses iniquités ; dix-sept jours après cette lettre, le 23 mai 1766, Wilmot expirait avant même d’avoir pu quitter ce climat du nord qu’il trouvait meurtrier.

  1. C. A. (1894) 1766. May 6. Halifax. Wilmot to Lords of Trade for leave of absence. N. 96. B. T. N. S. vol. 21.