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lui serait sans doute très utile, et les Acadiens y trouveraient peut-être plus d’avantage que dans toute autre Province. Les États pourraient concourir avec le gouvernement au prompt établissement de ces nouveaux colons, et la Société d’Agriculture qui y est établie pourrait leur fournir les moyens d’étendre leur industrie.

3o Il y aurait un établissement particulier à proposer pour les Acadiens prisonniers en Angleterre. Cet établissement, quoique moins susceptible d’extension que les deux autres, aurait cependant certains avantages. L’île de Bouin, sur la côte du Bas Poitou, n’est peuplée ni à proportion de sa grandeur, ni en raison de ses ressources. Si on y plaçait les Acadiens actuellement détenus en Angleterre, les parties incultes de cet île se défricheraient et la pêche qui se fait aux environs, acquèrerait une grande activité. On sait que cette pèche est celle de la sardine, objet d’autant plus important pour nous que c’est un des articles essentiels du commerce des Anglais qui exportent une quantité prodigieuse de ce poisson séché sur les côtes de Cornouailles.

De toutes les îles sur les côtes de France, le climat de celle de Bouin, est celui qui ressemble le plus à l’Acadie et qui par cette raison peut le mieux convenir aux Acadiens. D’ailleurs, ces malheureux prisonniers qui ont appris que l’île de Bouin appartenait au Duc de Nivernois, désirent avec passion de passer de préférence dans cette île dont il est seigneur, parce qu’ils le regardent comme le libérateur de leur captivité en Angleterre et qu’ils ne connaissent que lui. D’ailleurs, l’île de Bouin jouissant de temps immémorial de privilèges renouvelés successivement par tous nos rois, et en vertu desquels privilèges les dits insulaires ne sont soumis à aucune imposition ni corvée à la charge de se défendre eux-mêmes et d’entretenir les digues et canaux d’où dépend l’existence de l’île, les Acadiens s’y trouveraient plus heureux et y seraient par conséquent plus utiles. Il suffirait pour vivifier l’île de Bouin et la pêche qu’elle peut exploiter, d’y placer les Acadiens qui sortiront d’Angleterre. Peut-être même la totalité ne pourrait-elle pas être placée et le Duc de Nivernois prendra sur cela incessamment un éclaircissement positif, alors le surplus refluera en Bretagne où ils seraient fort bien pour eux et pour l’État.

Le Duc de Nivernois ne cachera pas ici qu’il serait fort flatté si Sa Mté avait la bonté de décider le sort du petit nombre des Acadiens qui sont en Angleterre en faveur de l’île de Bouin, attendu que ces malheureux sont d’une grande industrie et ont l’attachement le plus grand pour le roi et la France.

À l’égard de ceux qui sont déjà en France ou qui reviendront des Colonies anglaises, l’avis particulier du Duc de Nivernois serait aussi qu’on les mit plutôt en Bretagne qu’en Guyenne, à cause du climat et de la proximité de leurs frères qui seraient dans l’île de Bouin, laquelle n’est qu’à 8 lieues de Nantes.

Au surplus, quelque part qu’on place les restes de ce malheureux et respectable peuple, il sera nécessaire par politique ainsi que par équité, d’encourager leur zèle et leur industrie. Le Duc de Nivernois propose, pour parvenir à cet