Aller au contenu

Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Toute cette vaste baie, dit Casgrain[1], où travaillait, comme un essaim d’abeilles, un peuple industrieux, était maintenant déserte. Dans les villages silencieux, où les portes et les fenêtres des maisons battaient au vent, on n’entendait plus que les pas des soldats et les mugissements des troupeaux qui erraient inquiets autour des étables pour chercher leurs maîtres[2].

« D’après les ordres qu’il (Winslow) avait reçus du gouverneur Lawrence, toutes les constructions devaient

    pulation acadienne dans la déportation, il nous semble que le plus grand nombre a dû être embarqué violemment. Lawrence, dans une lettre à Robinson du 30 nov. 1755 (N. S. D. P. 285) dit ceci : The securing and embarlcing such a prodigious number of French inhabitants… — Le sort de ceux qui échappèrent à l’embarquement pour se sauver dans les bois fut peut-être encore pire, si possible, que celui des déportés : beaucoup y moururent de misère. Ce qui est certain, c’est que les anglais ont laissé derrière eux la dévastation, qu’ils ont fait de leur mieux pour se saisir de tout le monde, que ceux qui leur ont échappé n’ont pas été moins malheureux que les exilés mêmes, et que la meilleure solution à donner à ce problème : combien y a-t-il eu de déportés ? est de s’en tenir au dernier recensement d’Acadie et de comparer ce chiffre de 17 ou 18,000 habitants français avec l’état de la province après huit ans de chasse à l’homme.

  1. Pèlerinage etc. P. 141 — Richard a encore eu ici une distraction ; car, ni dans le MS. original — fol. 638 — ni dans l’édit anglaise (II, 120) il n’y a aucun signe pour annoncer qu’il fait un nouvel emprunt à cet auteur.
  2. Haliburton a été le premier à peindre ces scènes de désolation, et il l’a fait en traits profonds et émus. Ferland (II. XXXV, page 520,) a une très-belle page sur le même sujet, et qui n’est que la traduction de celle de Haliburton. (Cf. ce dernier. I. P. 180-1.) Pourquoi donc Ferland n’a-t-il pas eu la simplicité de le dire ? Et Casgrain ici s’inspire du même, sans le dire non plus. À preuve, cette phrase de Haliburton : « … For several successive evenings the cattle assembled round the smouldering ruins, as if in anxious expectation of the return of their master… » — Casgrain a laissé de côté le reste de la phrase, qui est très beau, et que Ferland, lui, avait utilisé et d’où il avait tiré un effet touchant : « … while all night long the faithful watch dogs of the Neutrals howled over the scene of desolation, and mourned alike the hand that had fed, and the house that had sheltered them,  » — « pendant les longues nuits les chiens de garde hurlaient sur ces scènes de désolation : leurs voix plaintives