Page:Richard - Le véritable conducteur aux Cimetières du Père La Chaise, Montmartre, Mont-Parnasse et Vaugirard.djvu/215

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et demi, enlevée à sa famille infortunée le 10 novembre 1812, le jour fixé pour son mariage… C’est Joséphine-Marie-Catherine Ferino… O destin ! que tes arrêts sont quelquefois cruels ! Au moment de lier sa destinée à un être chéri ; au moment où sa famille se felicitait de la voir entrer dans le port du bonheur, la mort se lève, tout disparait, et l’autel nuptial est remplacé par une tombe. Pauvres mortels ! et nous formons des projets ; nous affichons des volontés : et qu’en résulte-t-il ? Toujours des palais bâtis sur le sable, et qu’un souffle du zéphyr suffit pour faire écrouler.

Nous ne tardons pas à apercevoir la tombe de ce piquant abbé Geoffroy, dont les feuilletons firent si long-temps la réputation du Journal de l’Empire ; ce fut un homme d’esprit et d’érudition, qui eût été juge excellent des choses dramatiques, s’il eût été un peu moins sensible à la saveur du moka, au gout exquis d’un poulet à la Marengo, au parfum embaumé d’une dinde aux truffes ; sa plume subit trop de fois l’influence toute puissante de son estomac ; on alla même jusqu’à dire que parfois un rouleau de napoléons fit pencher la balance de la justice. Plus d’un talent fut rabaissé par lui pour rehausser une médiocrité dramatique ; et les Parisiens le virent presque sans regret descendre dans la tombe ; tant sa méchanceté, que l’on supposait vénale, faisait de tort au piquant de son esprit.

O fragilité des grandeurs humaines ! un simple marbre brisé offre à peine aujourd’hui le nom de l’amiral Bruix, et pourtant qui mieux que lui méritait un de ces monumens fastueux, partage de l’opulence, et si souvent peu mérités ? N’avait-il pas consacré sa vie entière au service de sa patrie ? ne l’avait-il pas illustrée par ses exploits maritimes ? Quelques instans encore, et sa sépulture, qui n’est que temporaire, aura disparu tout-à-fait. O ma patrie ! que tu es quelquefois ingrate !

On nous avait dit que Valmont de Bomare reposait dans cette enceinte ; nous l’avons cherché vainement ; ses ouvrages subsistent encore, et sa cen-