bas, avec les femmes de la maison, et qu’il m’a retenue jusqu’à minuit passé. J’étais résolue d’avoir aujourd’hui mon tour, et je ne suis pas fâchée qu’il m’ait donné ce prétexte. J’ai toujours aimé à passer le dimanche dans la solitude. Je suis déjà prête à sortir pour aller à l’église. Mon dessein n’est pas d’en chercher une plus éloignée que saint-James. Je vais prendre une chaise à porteurs, pour m’assurer si je puis sortir et rentrer librement, sans le trouver dans mon chemin, comme il m’est arrivé deux fois. à neuf heures. J’ai reçu votre obligeante lettre d’hier. Il sait que je l’ai reçue, et je m’attends, lorsque je le verrai, de lui trouver beaucoup de curiosité pour savoir ce que vous pensez de ces articles. Je n’ai pas douté de votre approbation ; et, dans cette idée, j’avais déjà fait une réponse, que je tiens prête pour lui. S’il arrive quelque nouvel incident qui fasse naître entre nous d’autres démêlés, je serai forcée de croire qu’il cherche des occasions pour le délai, et que son intention n’est pas de m’obliger. Il fait demander à me voir, avec beaucoup d’importunité. Il veut m’accompagner à l’église. Il est fâché que j’aie refusé de déjeûner avec lui. Si je m’étais rendue à ses instances, il est certain que je n’aurais pas été libre. Je lui ai fait répondre par Dorcas, que je souhaitais de l’être tout le jour, et que je le verrai demain d’aussi bonne heure qu’il lui plaira. Elle me dit qu’elle ne sait ce qui le chagrine, et qu’il querelle tout le monde. Il a recommencé ses demandes, et d’un ton plus sérieux. Suis-je rassurée contre Singleton ? M’a-t-il fait dire. J’ai répondu que, si je n’avais pas redouté Singleton hier au soir à la comédie, je ne devais pas être aujourd’hui plus timide à l’église ; sur-tout lorsqu’il y a tant d’églises à Londres, pour un seul et unique théâtre. J’ai consenti à me faire suivre par un de ses gens. Mais il me semble qu’il est de fort mauvaise humeur. C’est de quoi je m’inquiéte fort peu. Je ne veux pas être assujettie continuellement à ses insolentes loix. Adieu, ma chère, jusqu’à mon retour. Les porteurs m’attendent. Je me flatte qu’il n’aura pas la hardiesse de m’arrêter au passage. Je ne l’ai pas vu en sortant. Dorcas m’assure qu’il paraît fort chagrin. Elle ne croit pas que ce soit contre moi ; mais il paraît qu’il est arrivé quelque chose qui l’irrite. Peut-être joue-t-il ce rôle, pour m’engager à dîner avec lui. Je n’y consentirai pas, si je puis m’en défendre. Ce serait m’exposer à n’être pas libre un moment pendant le reste du jour. Ses instances ont été fort vives pour dîner avec moi. Mais j’étais déterminée à ne pas céder sur ce seul petit point, et j’ai pris le parti de me priver de dîner. à la vérité, j’étais à faire une lettre pour M Morden, que j’ai recommencée trois fois, sans être contente de moi-même, tant je trouve d’incertitude et de désagrément dans ma situation. Dorcas m’a dit qu’il n’avait pas cessé non plus d’écrire, et qu’il avait refusé de dîner, parce que je lui avois refusé ma compagnie. Il m’a fait demander ensuite d’être reçu du moins à l’heure du thé, en appelant, par la bouche de Dorcas, à la conduite qu’il tint hier au soir ; comme si c’était un mérite pour lui de n’avoir pas mérité de reproche. C’est ce que je lui ai fait répondre. Cependant j’ai renouvelé la promesse
Page:Richardson - Clarisse Harlove, II.djvu/117
Apparence