Page:Richardson - Clarisse Harlove, II.djvu/67

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pas traîner en longueur, parce qu’elle se trouverait dans la nécessité de céder à des instances continuelles, et qu’il ne dépendrait plus d’elle de prévenir des procédures désagréables ". Je vous assure, Madame Norton, sur ma conscience et mon honneur, que notre très-chère amie ignore absolument le parti que je prends de vous écrire ; et cette raison m’oblige de vous apprendre, en confidence, sur quels fondemens je m’y suis déterminée. Elle m’a priée d’engager M Hickman à faire quelques ouvertures, dans la même vue, à son oncle Harlove, mais indirectement, et comme de lui-même ; dans la crainte que, si cette démarche était sans succès, et que M Lovelace, qui n’est pas déjà content de se voir si peu avancé dans son affection, vînt à le découvrir, elle ne se vît privée de la protection de tout le monde, et peut-être exposée à de fâcheux inconvéniens de la part d’un esprit si hautain. Avec cette commission, et le zèle que j’ai pour ses intérêts, j’ai cru que, si le poids d’une aussi bonne femme, d’une aussi bonne mère et d’une aussi bonne sœur que Madame Harlove, était joint dans la même balance avec celui de M Jules Harlove, il serait difficile que ces deux forces réunies ne fissent pas une juste impression. M Hickman verra demain M Jules Harlove. Vous pourriez voir sa sœur dans l’intervalle. Si M Hickman était écouté favorablement, il dirait à l’oncle que vous avez vu Madame Harlove dans les mêmes intentions, et l’engagerait à délibérer avec elle sur les moyens de toucher ces cœurs endurcis. Voilà l’état de l’affaire, et le véritable motif de ma lettre. J’abandonne tout à votre discrétion. Le succès sera le plus ardent de mes vœux ; car mon opinion est que M Lovelace ne peut jamais être digne de notre admirable amie : et je ne connais même aucun homme qui mérite une femme comme elle. Prenez la peine de m’informer, par quelques lignes, du résultat de votre négociation. S’il n’est pas tel qu’on peut raisonnablement l’espérer, notre chère amie ne saura rien de la démarche que je fais, et je vous demande en grâce qu’elle ne l’apprenne pas de vous. Ce serait augmenter les plaies d’un cœur déjà trop blessé. Je suis, ma chère et digne Madame Norton, votre servante et votre véritable amie,



Madame Norton, à Miss Howe.

samedi, 13 de mai. Miss, j’ai le cœur pénétré de la nécessité où je suis de vous dire que, dans les dispositions présentes de la famille, il n’y a rien à se promettre des sollicitations, en faveur de ma très-chère Miss Harlove. Sa mère est digne de compassion. J’ai reçu d’elle une lettre des plus touchantes. Mais il ne m’est pas permis de vous la communiquer. Elle me défend de faire connaître à personne qu’elle m’ait écrit sur le sujet de ses peines, quoiqu’elle y ait été comme forcée pour le soulagement de son cœur. Ainsi, je vous le dis en confidence. J’espère de la bonté du ciel que ma chère miss s’est conservée sans tache, et qu’il n’y a pas d’homme au monde qui soit capable d’un détestable sacrilège. Non, non, il n’y a point de foiblesse à craindre d’une