fort dissipé, la moindre occasion de secouer le joug des apparences, auxquelles son orgueil le tenoit encore assujetti. Mais ensuite, lorsqu’elle le vit plus froid dans ses instances, & qu’elle eut observé que sa présence lui faisant prolonger son séjour à la Ville, c’étoit une augmentation considérable de dépense, elle trouva des raisons pour se dispenser de le suivre ; d’autant plus qu’ayant alors les trois Enfans qui lui sont restés, elle jugea que Sir Thomas seroit aussi satisfait qu’elle, de la voir renfermée dans les soins domestiques. Mylady Grandisson, voyant qu’elle ne pouvoit engager son Mari à diminuer ses excessives dépenses, regarda comme une partie de son devoir d’employer toute son habileté à le mettre en état de les soutenir ; leurs Enfans étoient si jeunes, que leur éducation n’en demandoit pas de long-tems.
Quelle Mere, ma chere Lucie ! Dira-t-on que les mères ne soient pas la plus utile partie des familles, lorsqu’elles sont attachées à leurs devoirs, & qu’un Mari néglige les siens ? Sir Thomas Grandisson rapportoit tout à lui-même ; & sa Femme ne connoissoit de plaisir que dans son Mari & ses Enfans.
Cependant, avec la plus sage économie, cette vertueuse Dame n’avoit pas le cœur étroit. Elle se faisoit aimer par ses généreuses inclinations ; tous ses Voisins l’adoroient. Sa table étoit abondante ; elle