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en guise de préface


VII



Michelet à la mer a fait parler son verbe,
Son verbe à lui, brûlant, haché, fiévreux, nerveux,
Éclairs et coups de vent, bonds et langues de feux.
Rayons de miel doré, tranches de fruit acerbe.

Beau verbe ! Mais le tien, ô mer, est plus superbe.
Lorsque l’orage en rut mord ton mufle baveux.
T’empoigne à bras le corps, t’arrache les cheveux,
Et te les éparpille au loin comme un tas d’herbe.

Beau verbe ! Mais le tien, ô mer, est plus câlin.
Quand le soleil sur toi se couche à son déclin.
Que ton corps frissonnant se pâme à ses caresses.

Et que parmi les bruits lentement apaisés
Tu t’endors alanguie à de vagues paresses
Où passent en chantant des rêves de baisers.