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la mer


Dont la barque ne peut plus être renflouée
Et qui, juste au moment de sombrer sous les flots,
Peuvent se raccrocher des doigts à ta bouée.

Refuge des pécheurs, tu connus mes poings clos
Frappant sur ma poitrine au jour des repentances ;
Tu connus mes remords qui crevaient de sanglots.

Mon équité rendant contre moi des sentences,
Et mon cœur indigné du mal qu’il avait fait
S’infligeant en retour de rudes pénitences.

Mais alors qu’au plus fort du deuil il étouffait,
Ô mer, c’est toi qui vins apaiser ses alarmes,
Consolatrice des affligés en effet,

Consolatrice aux mots profonds et pleins de charmes
Qui sais ce qu’il faut dire aux plus désespérés,
Consolatrice dont la main sèche leurs larmes !

Ô vous qui comme moi près d’elle souffrirez,
Ô vous qui comme nous avez souffert près d’elle,
Lamentable troupeau de fous et de navrés

Dont la consolatrice est l’amante fidèle,
Ô vous tous qu’elle endort, malades enfançons
Puisant le lait d’oubli dans ses seins d’asphodèle.

Unissez votre voix à la mienne et lançons
Vers son trône encensé du feu de nos louanges
L’hosanna de nos plus triomphales chansons !