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Page:Richepin - Les Morts bizarres, 1876.djvu/33

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LA UHLANE

Horreur ! Le capitaine était affaissé par terre, dans une mare de sang, avec une énorme blessure au cou. Son sabre-baïonnette, arraché de son fusil, était planté dans la plaie béante et rouge.

Quelques minutes après, sans avoir eu le temps de dire un mot, il mourut.

Sa femme ne pleurait pas. Elle avait l’œil sec, la gorge contractée, et fixait la uhlane avec une férocité calme qui faisait peur.

— Cette femme m’appartient, nous dit-elle tout à coup. Vous m’avez juré, il n’y a pas huit jours, de me la laisser tuer à mon gré si elle tuait mon mari. Il faut tenir votre serment. Vous allez l’attacher solidement dans l’âtre, debout contre le fond de la cheminée, puis vous vous en irez où vous voudrez, mais loin d’ici. Je me charge de ma vengeance. Laissez le corps du capitaine. Nous resterons ici tous les trois, lui, elle et moi.

Nous obéîmes, et nous nous en allâmes. Elle nous avait promis de nous écrire à Genève, où nous retournions.

VI

Deux jours après, je recevais la lettre suivante, qui était datée du lendemain de notre départ, et avait été écrite à l’auberge de la Grande-Route :