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Page:Rilke - Histoires du Bon Dieu.pdf/58

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que tu devras connaître, en Orient, non loin d’ici, à la pierre blanche.

Et il lui inculqua les trois réponses, l’une après l’autre. D’étonnement le tsar ne parvenait même pas à le remercier.

— Que dois-je te donner pour ta récompense ? demanda-t-il enfin.

— Rien, fit le paysan, qui saisit un chevron et voulut remonter à l’échelle.

— Halte, ordonna le tsar. Cela ne peut aller ainsi. Il faut que tu formes un vœu.

— Eh bien, petit père, si tu l’ordonnes, envoie-moi une des douze tonnes d’or que tu recevras des princes, en Orient.

— Bien, approuva le tsar. Je te donne une tonne d’or.

Puis il s’en fut au galop, pour ne pas oublier entre temps les réponses.

Plus tard, lorsque le tsar fut revenu de l’Orient, avec les douze tonnes, il s’enferma dans son palais, à Moscou, au milieu du Kremlin à cinq portes, et vida une tonne après l’autre sur le parquet luisant de la salle, jusqu’à ce qu’il eût devant lui une véritable montagne d’or qui projetait une grande ombre noire