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Page:Rilke - Poésie (trad. Betz).pdf/12

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des Brillants, à Meudon, puis à l’Hôtel Biron, Rilke vit dans l’intimité du grand sculpteur qui avait entrepris de « former avec son cœur ». Qu’un homme peut tirer de lui-même la substance des œuvres les plus démesurées et ne faire que de son seul travail la loi de sa vie, c’est là ce dont il se convainc encore une fois dans ces ateliers énormes où, de saison en saison, grandissent sans arrêt mais sans hâte, les statues, pareilles à des arbres.

« J’étais venu chez vous pour vous demander : comment faut-il vivre ? Et vous m’avez répondu : en travaillant. Et je le comprends bien. Je sens que travailler, c’est vivre sans mourir. Je suis plein de reconnaissance et de joie. Car, depuis ma première jeunesse, je ne voulais que cela. »

Qu’importe que bientôt un malentendu vienne refroidir cette amitié ! Rassérénés par la séparation, les deux hommes n’en continueront pas moins à s’écrire. Délivrés des attaches quotidiennes, leurs relations se sont éclaircies, simplifiées. Il ne reste bientôt qu’un grand exemple, invisible et présent dans tout ce qu’écrira Rilke, « comme le grand printemps est dans chaque fleur d’un pays qui commence à comprendre la voix de la vie ».

Cette fleur du printemps, dans combien de pays ne la