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LA MER ET LES POISSONS.

Personne ne le pense. Au contraire, désireux que l’on est d’atteindre tous les abus dont la reproduction des produits de la mer peut avoir à souffrir, on opine résolument pour que les pêcheurs étrangers soient expulsés de nos baies et avec eux la pêche de plaisance. Cela serait bien rigoureux, au moins en ce qui concerne un divertissement toujours renfermé dans des limites très-circonscrites et qui est certainement peu coupable, sinon tout à fait innocent, de la disparition du poisson ; mais pour les gens pénétrés du respect de la légalité, la pêche réglée et autorisée au profit de nos marins qui acquittent, en échange, un tribut de service public, ne comporte ni tolérance, ni exception d’aucune sorte. Conséquemment, point de sacrifice à faire, surtout aux étrangers.

Toutefois, ce sont nos propres pêcheurs qui repoussent la prohibition de la pêche à la traîne et ceux-ci ont des titres incontestables aux ménagements de l’administration. Ne voulant pas leur imposer une mesure de conservation qui n’est pas acceptée, on se demande et on examine s’il ne suffirait pas de s’arrêter à des interdictions de pêcher telles ou telles espèces de poissons à l’époque où elles fraient.

Selon nous, ces demi-moyens seraient plus fastidieux qu’utiles, car ce qu’il faut protéger pour garantir le repeuplement des eaux, c’est moins l’émission de la semence que la germination et le développement des germes. Or, empêcher la capture d’une espèce de poisson au moment où elle va pondre, est à peu près vain si, une fois qu’elle a répandu ses œufs, les filets racleurs viennent troubler l’éclosion ou fouler et disperser les larves et les embryons qu’elle a produits.

Et puis, comment voudrait-on asseoir un système de protection catégorique et efficace sur cette diversité de mœurs et d’habitudes qui distingue une famille de poisson d’une autre cependant mêlée à celle-là et vivant avec elle dans la même prairie