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Page:Riotor - Le Mannequin, 1900.djvu/17

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le Mannequin qui devient le professeur du maître. — Ne l’est-il pas toujours d’ailleurs, dans son complaisant mutisme.

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Mais le Mannequin pourrait être envisagé, d’autre part, au point de vue de son rôle en amour. Il existe des Mannequins faits pour consoler les veuvages des mâles, pour tempérer les ardeurs des étalons qui souffrent des solitudes prolongées. Il existe des femmes dociles, pour tout dire confectionnées pour le confort des embrassements illusoires et agencées pour donner au contact la sensation de la peau, de sa température et de sa souplesse.

Il y a environ quinze années, me trouvant à Anvers, guidé par un aimable artiste compatriote du baron Leys, je visitai tous les coins curieux de la ville, ceux que les seuls initiés connaissent et qui valent bien les aspects pornocratiques de ce tapageur Rydeck dont je vis naguère l’agonie éclatante avant sa disparition.

Comme nous stoppions le soir sur la Place Verte, mon ami cherchait ce qui pourrait bien encore m’intéresser. Tout à coup, il sourit, et, m’interrogeant :

— Avez-vous jamais vu des femmes en caoutchouc ?

— Des femmes en caoutchouc ? Mais à quel usage ?

— Pour la Marine, pour les hommes qui restent souvent des mois et des mois sur des voiliers sans connaître les nécessaires soulagements qu’on trouve dans les petites rues de tous les ports du monde.

— Vraiment, ça existe ?… C’est réel !

— Si ça existe, voulez-vous voir ça, — il y a une bonne vieille dame, ici, à Anvers, la maman Van der Mys, qui en tient une fabrique des mieux achalandées, comme vous allez, — si ça vous goûte, — pouvoir vous en convaincre…