Page:Riotor - Le Mannequin, 1900.djvu/66

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— Fort ingénieux, une canne bizarre ! répéta le prince.

— Monseigneur, ce n’est pas une canne, c’est une danseuse.

— C’en est tout au moins le principe.

— Vous l’avez dit, monseigneur… Or, ne croyez-vous pas, ici l’illustre mécanicien fit une pause, semblant se recueillir — ne croyez-vous pas que votre vieil ami de Bouillon, en admirant Lili Scotti, des Bouffes Italiens, ne soit amoureux que d’un principe ?…

Un silence suivit ces paroles. Puis le guerrier se frappa le front, soudainement édifié.

— Parbleu, vous avez raison, monsieur…

— Tout ne le prouve-t-il pas ? murmura Vaucanson en contemplant sa canne. Cette demande qu’il me fit d’imiter mécaniquement le saut ou la danse, ce défi de construire une machine qui put rivaliser avec Lili Scotti et jusqu’à son départ précipité pour le spectacle… Il serait resté parmi nous, sans nul doute, si nous avions pu lui présenter sa danseuse… ou tout au moins l’illusion.

Le prince hocha dubitativement la tête, puis son front se rida, signe d’une grande tristesse.

— Heureux, dit-il, ceux qui croient à la toute puissance de la science ! Il est un rempart, humble viscère creux qu’on écraserait d’une chiquenaude, le cœur, contre lequel elle se brise, et se brisera toujours !… Les sentiments n’ont que