Page:Riotor - Le Mannequin, 1900.djvu/75

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satisfaction. À la portière de sa voiture, où les deux hommes s’étaient rendus, il se pencha contre l’oreille de Vaucanson, et d’une voix que l’autre devina plutôt :

— Vous me rendez le plus heureux des mortels… grand sorcier !…

— Alors… c’est convenu ? Je vous la ferai porter demain ? Le vieux gentilhomme hocha affirmativement hi tête. Après un silence il monta dans sa voiture, tendit la main au savant en articulant d’une voix distincte :

— La Lili que vous m’enverrez sera moins triviale que l’autre… Bonsoir, cher Monsieur Vaucanson…

Et ils se séparèrent. Dès lors le duc de Bouillon ne reparut plus aux Bouffes Italiens. Sa loge, toujours louée, demeura vide, à la grande fureur de Lili, qui avait, dès la représentation suivante, repris ses exercices chorégraphiques. Son caractère, naturellement acrimonieux, s’en aigrit davantage. Elle se querella avec tout le monde, et devint si acerbe, en même temps que maladroite, que le directeur profita d’une légère maladie qu’elle contracta des suites d’une colère rentrée pour rompre son engagement et la réexpédier en Italie, en compagnie de sa « cara madre ».

Vaucanson mourut l’année suivante. Quant au duc, on ne le rencontra plus nulle part. Il vécut encore sept ans, cloîtré dans son hôtel de la rue Lesdiguiérs, près de la Bastille, sans que rien put. détruire l’attrait qui le retenait loin de tout plaisir…