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Page:Rivard - Monseigneur de Laval, 1891.djvu/14

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Cette mort aux affections, le missionnaire la subit ; ce calice, il le boit jusqu’à la lie.

Est-ce à dire, messieurs, que le missionnaire n’est plus attaché à ceux qui l’aiment, et que son refuge est

Qui n’a point de lil’oubli profond et morne,
Qui n’a point de limite et qui n’a point de borne ?

Ah ! demandez-moi si le fleuve s’arrête dans son cours, si la pierre reste suspendue dans l’espace, si les astres ne continuent plus leur course, si le rossignol se tait, si l’aigle ne perce plus la nue ; mais ne me demandez pas, ne me demandez jamais si le cœur cesse d’aimer !

Qui connaît les trésors d’amour que renferme le cœur du missionnaire ? L’ingratitude lui est inconnue. Il passe dans la vie, sans cesse séparé de ce que son affection voudrait posséder, et subissant par là un martyr de chaque instant.

Ce que je viens de dire du missionnaire est l’histoire de Mgr de Laval. Lui aussi est mort à sa famille, à ses amis, à son pays.

En se consacrant aux missions, il se séparait de parents bien-aimés, au milieu desquels il aurait pu goûter les douceurs de la piété filiale et fraternelle, et de compagnons qui lui auraient procuré le bonheur de l’amitié.

À sa famille et à ses frères par le cœur et l’esprit, il préféra son Dieu ; à l’amitié des hommes, l’amour divin.