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Quand il se part de ses joyeux amis ;
Mais il n’est nul congé, quoiqu’on en die,
Si douloureux que d’ami & d’amie.

On croit d’entendre Voiture ou Chapelle. Comparez maintenant ces vers de Ronsard, qui peint la fabrique d’un Vaisseau :

Fait d’un Art Maistrier,
Au ventre creux & d’artifice prompt,
D’un bec de fer leur aiguise le front.
&c. &c. &c.</poem


Ou ceux-ci, dans lesquels le Grec échappe tout pur :
<poem>
Ah ! que je suis marri que la Muse Françoise
Ne peut dire ces mots ainfi que la Grégeoise :
Ocymore, dispotme, oligochronien :
Certes je le dirois du sang Valésien.

Et ceux d’un de ses Contemporains sur l’allouette :

Guindée par zéphire,
Sublime en l’air vire & revire,
Et y déclique un joli cri,
Qui rit, guerit & tire l’ire
Des esprits mieux que je n’écris.

Ces Poëtes, séduits par le plaisir que donne la difficulté vaincue, voulurent l’augmenter encore, afin d’accroître leur plaisir ; & de-là vinrent les vers monorimes & monosyllabiques ; les échos, les rondeaux & les sonnets, que Boileau a eu le malheur de tant louer. Tout leur Art Poétique roula sur cette multitude de petits Poëmes, qui n’avoient de recommandable que les bisarres difficultés dont ils étoient hérissés, & qui sont presque tous inintelligibles.