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et comme il y répond en se servant le plus souvent des développements platoniciens qu’il a trouvés dans la préface du Commentaire de Simplicius, nous aurons là une indication très précise sur sa manière d’interpréter le stoïcisme.

C’est en somme la thèse fondamentale du Manuel qu’il défend en l’appuyant, comme le fit Simplicius, sur la métaphysique platonicienne. Le Manuel apprend à vivre, mais à qui ? Non point à ceux qui, dégagés de leur corps, vivent déjà d’une vie contemplative, ni à ceux qui, déjà maîtres de leurs passions, sont des âmes purifiées et n’ont plus besoin de règles pratiques de vie, mais à ceux qui sont en passe de se purifier, car ils ont compris ce qu’est véritablement l’homme. Et ici Politien reprend, comme Simplicius dans sa préface, la thèse de l’Alcibiade de Platon. Il ne s’en cache point[1], car, pour lui, ce qui fait la force et la valeur du Manuel d’Épictète, c’est qu’il est l’application de cette vérité fondamentale, que toute l’essence de l’homme réside dans son âme raisonnable. En effet, écrit-il à Scala, il faut ou bien que l’homme soit corps, ou bien qu’il soit âme, ou encore les deux ensemble. Or, il est un fait évident, c’est que l’âme est-ce qui meut le corps[2], et le corps vis-à-vis de l’âme joue donc le rôle d’instrument ; par conséquent, l’homme véritable est celui qui se livre à sa tâche d’homme et qui cultive son âme raisonnable[3], et ce qui seul dépend de son âme. À la lumière de cette vérité, s’éclaire merveilleusement la division d’Épictète entre les choses qui dépendent de nous et celles qui n’en dépendent pas. Tout ce que prescrit Épictète est bien en notre pouvoir, puisqu’il nous apprend à nous détacher de tout ce qui n’est point l’âme raisonnable.

Sur cette base solide, il est facile à Politien de bâtir la

  1. Cf. lettre citée : « Is igitur Plato in eo libro, qui de hominis natura inscribitur Socratem cum Alcibiade illo, cui pulchro cognomen fuerit, disputantem inducit, quo in libro nihil esse aliud hominem quem dicimus probat nisi rationis participem animum. »
  2. Ibid. : « Necesse est hominem aut animum esse, aut corpus, aut utrumque simul… animus vero is est, qui moveat. »
  3. Ibid. : « Ipse igitur homo est, quique hominis curas studet, animum curet. »